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L’eau dans la civilisation islamique

L’eau dans la civilisation islamique

Ne nous étonnons pas de la grande importance qu’a prise la question du percement de la couche d’ozone qui se trouve dans les couches supérieures de notre ciel et qui participe au réchauffement climatique de notre planète ou encore celle du phénomène de « la maison de verre » qui consiste en une accumulation de l’oxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère, nous avons là les questions qui préoccupent le plus les scientifiques aujourd’hui ; en revanche, nous sommes a contrario fort étonnés de constater qu’une autre question primordiale ne suscite pas le même intérêt, il s’agit de la question de la crise de l’eau. Pourtant, selon certains scientifiques, cette question de l’eau va devenir aussi importante que celle de la couche d’ozone ; ainsi, par exemple, Asith Boas, qui est le président de l’union des ressources mondiales en eaux située dans l’Etat américain de l’Illinois, affirme la chose suivante : « L’eau est une richesse limitée alors que la population mondiale ne cesse d’augmenter et cette progression ne semble pas avoir de limites, il est donc fort possible qu’un jour cette richesse s’épuise jusqu’à son tarissement, selon certaines prévisions ce dernier pourrait survenir au milieu du XXIe siècle voire avant ». De son côté Iliyâs Salâma déclare : « Notre besoin en eau sera multiplié par deux en 2020, et c’est donc l’eau et non le pétrole qui deviendra la ressource naturelle la plus convoitée dans tous les pays du Moyen-Orient ».
Des agences de presse ainsi que des organismes d’information locaux et internationaux ont fait circuler l’information selon laquelle la sécheresse dans l’est de l’Afrique s’est aggravée ces derniers temps, et ce, à cause du fait que la pluie se fait extrêmement rare depuis plusieurs années dans cette vaste région. Cette situation gravissime a notamment provoqué la disparition des animaux qui sont l’une des principales sources alimentaires des hommes de ces contrées, puis la mort de dizaines de milliers d’individus qui ne purent plus subvenir à leurs besoins alimentaires ; par ailleurs, des centaines de milliers de personnes furent contraintes de quitter cette région aride vers des pays voisins afin de trouver de l’eau qui est sans conteste la source de la vie. Il est à noter que les problèmes liés au manque d’eau ne font que s’aggraver, et cela nous fait prendre conscience un peu plus de l’aspect essentiel de cet élément liquide pour la vie en général et pour celle de l’homme en particulier ; ainsi, Allah, exalté soit-Il, dit dans le Noble Coran : « Ceux qui ont mécru, n’ont-ils pas vu que les cieux et la terre formaient une masse compacte ? Ensuite Nous les avons séparés et fait de l’eau toute chose vivante. Ne croiront-ils donc pas ? » (Coran 21/30). L’eau est donc la source de la vie ; les exégètes du Coran ont dit qu’il faut comprendre de ce noble verset que l’eau est la cause de toute chose à la surface de la terre, il est à noter que la science a démontré que l’eau est le constituant le plus important de la composition des cellules, elle est en outre l’élément de base de tout être vivant végétal ou animal, Allah, exalté soit-Il, dit : « Et c’est Lui qui, du ciel, a fait descendre l’eau. Puis par elle, Nous fîmes germer toute plante, de quoi Nous fîmes sortir une verdure, d’où Nous produisîmes des grains, superposés les uns sur les autres […] » (Coran 6/99). En sus, il est important de signaler que l’eau est le milieu naturel de très nombreuses créatures et espèces vivantes ; ainsi, Allah, exalté soit-Il, dit : « Et c’est Lui qui a assujetti la mer afin que vous en mangiez une chair fraîche […] » (Coran 16/14), c’est-à-dire qu’Allah, exalté soit-Il, a fait de l’eau un environnement adéquat pour les espèces marines dont la plupart servent à l’homme de nourriture, Il dit en outre : « La chasse en mer vous est permise, et aussi d’en manger, pour votre jouissance et celle des voyageurs » (Coran 5/97), il faut comprendre par « mer » (bahr) dans ces deux versets toutes les eaux qui recèlent des espèces vivantes que l’homme peut chasser et consommer, cela implique les océans et mers salés bien sûr mais également les fleuves, les lacs, les étangs, etc. Il faut savoir que le terme « eau » (al-mâ`) revient dans le Coran 63 fois, et ses différents sens apparaissent à divers endroits : la pluie, la mer, les fleuves, etc., cela indique sa grande importance. Le plus souvent le terme « eau » a dans le Noble Coran le sens de « bienfait » (al-ni’ma), car en effet cet élément est nécessaire à la vie et aux êtres vivants, sans l’eau ces derniers ne pourraient vivre, grâce à elle la terre reverdit après avoir connu la sécheresse et revit après avoir été infertile, à ce propos il est dit dans le Noble Coran : « De même tu vois la terre desséchée : dès que Nous y faisons descendre de l’eau elle remue, se gonfle, et fait pousser toutes sortes de splendides couples de végétaux » (Coran 22/5) ; l’eau est en effet l’énergie vitale, car elle fait sortir de la terre les végétaux qui nourrissent les animaux et les hommes, cela permet notamment à ces derniers de se maintenir sur terre comme le veut Allah, exalté soit-Il : « C’est Lui qui, du ciel, a fait descendre de l’eau qui vous sert de boisson et grâce à laquelle poussent des plantes dont vous nourrissez vos troupeaux. D’elle, Il fait pousser pour vous, les cultures, les oliviers, les palmiers, les vignes et aussi toutes sortes de fruits. Voilà bien là des preuves pour des gens qui raisonnent » (Coran 16/10-11).


L’eau est incontestablement l’énergie vitale, car elle est à la base de la création de tout animal, Allah, exalté soit-Il, dit : « Et Allah a créé d’eau tout animal. Il y en a qui marche sur le ventre, d’autres marchent sur deux pattes, et d’autres encore marchent sur quatre. Allah crée ce qu’Il veut et Allah et Omnipotent » (Coran 24/45), et ces différents animaux sont tous au service de l’homme qui s’en sert pour se déplacer, s’en nourrit et se sert de leurs peaux pour s’habiller. Etant donné que l’eau est d’une importance cruciale pour la vie et pour l’homme, Allah, exalté soit-Il, insiste beaucoup sur le fait de reconnaître cet immense bienfait et Il a ordonné à celui qui en bénéficie d’être très reconnaissant et de Le remercier pour cela : « Voyez-vous donc l’eau que vous buvez ? Est-ce vous qui l’avez fait descendre du nuage ? Ou [en] sommes Nous le descendeur ? Si Nous voulions, Nous la rendrions salée. Pourquoi n’êtes-vous donc pas reconnaissants ? » (Coran 56/68-70).
Par ailleurs, le Tout-Puissant met au défi les hommes afin que ces derniers ne s’enflent pas d’orgueil du fait du peu de science qu’ils possèdent et ne s’égarent donc pas du droit chemin, Il, exalté soit-Il, dit : « Dit : « Que vous en semble ? Si votre eau était absorbée au plus profond de la terre, qui vous apporterait de l’eau de source ? » (Coran 67/30). Si l’homme peut effectivement à peu près prévoir de manière approximative où et quand il va pleuvoir, qu’il réfléchisse avant toute chose à l’origine des nuages qui apportent cette eau, ces derniers n’ont pas été créés du néant, mais c’est Allah, exalté soit-Il, qui les a créés : « C’est Lui qui vous fait voir l’éclair (qui vous inspire) crainte et espoir ; et Il crée les nuages lourds » (Coran 13/13). L’eau est donc si essentielle à la vie que si cette dernière venait à manquer, toute trace de vie sur cette terre disparaîtrait ; c’est pourquoi l’Islam encourage à préserver les sources d’eau et à les protéger contre tout ce qui pourrait les tarir ou les polluer.


Etant donné la préciosité de l’eau et son possible tarissement à l’avenir, il est absolument interdit de la gaspiller. A ce propos, le Prophète () était dans le domaine de la préservation de l’eau de tout gaspillage le plus haut exemple, d’après Anas (Radhia Allahou Anhou) : « Le Prophète () se lavait avec le volume d’un sâ’ et faisait ses ablutions avec celui d’un mudd » (rapporté par Mouslim), il faut noter que le sâ’ et le mudd étaient deux récipients utilisés comme unité de mesure par les Médinois, la capacité du premier était quatre fois supérieure à celle du second. Par ailleurs, le Prophète () fut le premier à appeler les gens à ne pas gaspiller l’eau, il () a dit : « Mangez, buvez et donnez l’aumône sans faire de gaspillage et sans arrogance » (hadith rapporté par Ibn Mâdjah). Il () a en outre interdit aux musulmans de gaspiller lors des ablutions ou du bain ; à ce propos, ‘Abdallah ibn ‘Umar a rapporté que le Prophète () passa près de Sa’d ibn Abî Waqqâs alors ce dernier faisait ses ablutions, et il () lui dit : « Qu’est-ce donc que ce gaspillage d’eau ? », Sa’d lui répondit : « Doit-on également veiller à ne pas faire de gaspillage lors des ablutions ? », alors le Prophète () lui rétorqua : « Bien sûr, et ce, même si tu les fais à partir d'un fleuve .» (hadith rapporté par Ibn Mâdjah). Le Prophète () ainsi que les gens de sa maison étaient les premiers à appliquer ces recommandations concernant l’économie de l’eau ; d’ailleurs, selon ‘Abdallah ibn Zayd (Radhia Allahou Anhou), le Prophète faisait ses ablutions avec le volume du deux tiers d’un mudd. Par ailleurs, d’après Aïcha (Radhia Allahou Anha), cette dernière se lavait avec le Prophète () dans la même bassine, laquelle contenait l’équivalent de trois mudd-s d’eau. Il a été rapporté que quelqu’un interrogea Djâbir au sujet du ghusl, ce dernier leur dit qu’un sâ’ est suffisant pour se laver, mais l’homme répondit que cela ne lui suffirait pas, alors Djâbir lui dit que cette quantité suffisait à une personne qui avait plus de cheveux que lui et était meilleur que lui, la personne en question n’était autre que le Prophète ().


Les livres de fiqh mettent en évidence le fait que les anciens de notre communauté faisaient bien attention à ne point gaspiller d’eau lorsqu’ils se lavaient ou faisaient leurs ablutions ; par conséquent, si cette détermination à ne pas gaspiller de l’eau lors des ablutions et autres bains est forte, c’est logiquement qu’elle fut encore plus forte dans les autres utilisations que les musulmans faisaient de l’eau. C’est ainsi que les Califes Bien-guidés suivirent dans ce domaine l’exemple du Prophète (), ils prirent notamment soin des sources d’eau, de même qu’ils organisèrent son stockage afin de ne jamais en manquer, surtout lors des périodes de sécheresse et ils donnèrent des recommandations aux musulmans en matière de consommation d’eau. Ainsi, lorsque les musulmans firent la conquête du Châm, de l’Iraq et de l’Egypte, ils firent tout leur possible pour améliorer la situation de ces pays, et notamment en ce qui concerne l’agriculture et l’utilisation de l’eau, ils construisirent donc des barrages et des viaducs, de même qu’ils creusèrent de nombreux canaux. Les livres d’histoire nous rappellent qu’après la conquête de l’Egypte par ‘Amrû ibn al-‘Âs, ce dernier employa 100 000 ouvriers qui étaient chargés de rénover et réparer les réseaux d’irrigation de ce pays, et ce, hiver comme été.

Dr. Barakât Mohammed Murad

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