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Interdiction de jeter l’anathème sur quelqu’un sans preuve claire

Question

Assalam alaykum,
La louange appartient à Allah et que la prière et le salut d’Allah soient sur son Prophète, ainsi que sur ses compagnons et tous ceux qui lui seront alliés.
Questionnement sur le "takfirisme" ou excommunication.
Abu Qutada dit : le takfirisme est un droit divin/un droit légal et la base de la Charia et donc en aucun cas un droit individuel.
Il n'est pas permis d'y avoir recours excepté par un Texte, une Preuve du Livre(Quran) ou de Sunna ou bien Ijtihad des gens de science et un consensus.
1/Cette définition est-elle juste ?
2/Si l'on constate une personne qui renie une ou des obligations d'Allah voire les Piliers essentiels de la Foi est-on en droit de penser que cette personne est mécréante ou le lui dire ?
3/De même dénoncer une personne qui se donne l'apparence "musulmane" qui plus est, a une certaine aura auprès d'une assemblée, à des buts de protéger son "fan-club" est-il obligatoire et légal ?
Où s'arrête notre droit individuel de "takfiriser" pour le bien de soi ou de la Oumma ; ses causes ses effets sa légitimité car selon la définition de Abu Qutada une personne peut le faire avec une Preuve irréfutable non ?

Réponse

Louange à Allah et que paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :

Le terme « takfîr » désigne le fait de juger et de déclarer une personne mécréante. Il ne fait aucun doute qu’il faut se référer à la Charia dans le domaine du takfîr et qu’il est interdit de juger et déclarer quiconque mécréant en suivant simplement en cela les passions de l’âme, car il s’agit là d’avancer au sujet d’Allah des propose qui ne sont basées sur aucune science, or, cela est interdit. Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) :

« Dis : "Mon Seigneur n'a interdit que les turpitudes (les grands péchés), tant apparentes que secrètes, de même que le péché, l'agression sans droit et d'associer à Allah ce dont Il n'a fait descendre aucune preuve, et de dire sur Allah ce que vous ne savez pas." » (Coran 7/33)

Ibn ‘Uthaymîn a dit après avoir cité le verset précédent : « Il est interdit à quiconque de jeter l’anathème sur quelqu’un sans preuve claire et explicite, car le terme "takfîr" désigne le fait de faire sortir quelqu’un du cercle de l’Islam pour le faire entrer dans le cercle de la mécréance.
La question est donc très grave et si nul ne peut dire d’une chose licite qu’elle est illicite et inversement, nul ne peut également dire d’un musulman qu’il est mécréant. Cela est sans doute pire encore, car déclarer une personne mécréante a de nombreuses conséquences importantes. En effet, un mécréant ne peut être marié à une musulmane et ne peut servir de tuteur dans un mariage ou pour ses enfants. De plus, on ne fait pas sa toilette mortuaire lorsqu’il décède, il n’est pas placé dans un linceul, on n’accomplit pas la prière mortuaire pour lui, il n’est pas enterré parmi les musulmans et on n’hérite pas de lui selon la plupart des oulémas. La question n’est donc pas anodine et le takfîr est une chose difficile… » (Fatâwâ Nûr ‘Alâ al-Darb)

Les jurisconsultes expliquèrent – par la grâce d’Allah – les choses qui mènent à la mécréance.

Il faut donc être vigilent sur la question du takfîr et faire la différence entre la parole en elle-même, celui qui la prononce, la mécréance, l’acte en lui-même et l’auteur de cet acte. En effet, celui qui prononce une parole ou accomplit un acte relevant de la mécréance ne remplit pas forcément les conditions du takfîr ou une chose le concernant peut l’empêcher d’être qualifié de mécréant, comme le fait qu’il soit ignorant, qu’il ait mal interprété quelque chose ou qu’il y ait été contraint. Toute question religieuse nécessairement connue de tous n’est pas forcement claire pour celui qui vit dans certains environnements comme pour celui qui vit dans une contrée reculée loin de toute science et des oulémas. Cheikh al-Islâm ibn Taymiyya a dit : « Le takfîr est soumis à certaines conditions et il peut y avoir des choses qui l’empêchent et qui annulent son application dans le cas d’un individu en particulier. Quant au takfîr dans l’absolu, il n’implique pas forcément le takfîr d’un individu en particulier, sauf si les conditions de son application sont remplies et que rien ne vient l’en empêcher. Cela est démontré par le fait que l’imam Ahmad et la plupart des oulémas qui prononcèrent le takfîr de manière générale ne jugèrent pas de l’excommunication de la plupart des individus en eux-mêmes ayant prononcé ces paroles… »

Il dit à un autre endroit : « Le takfîr fait partie de la menace. En effet, il se peut qu’une personne réfute une parole du Messager, mais que cet homme vienne juste d’embrasser l’Islam ou ait grandi dans une contrée reculée. Ainsi, ce genre de personne n’est pas accusée d’apostasie pour ce qu’elle réfute, jusqu’à ce qu’on lui apporte la preuve que ce qu’elle réfute est bien vrai, car il se peut que cette personne n’ait jamais entendu ces textes, les ait cru non-authentiques ou qu’une chose l’ait contrainte à les interpréter, même si elle avait tort. Je rappelle toujours le hadith dans lequel le Prophète () a dit :
"Un homme dit : ‘Lorsque je décéderai, incinérez-moi et dispersez mes cendres au cours d’un jour de grand vent, car je jure par Allah que s’Il parvient à me ressusciter, Il me punira certes d’un châtiment que jamais personne n’a subi.’ À sa mort, les gens firent donc ce qu’il avait demandé, mais Allah (le ressuscita et) lui demanda : - ‘Quelle est la raison qui t’a poussé à faire cela ?’ - ‘Ma crainte de Toi.’, répondit l’homme. Et Allah lui pardonna alors." (Boukhari et Mouslim)
Cet homme douta donc de la capacité d’Allah à le ressusciter si ses cendres étaient répandues et pensa même ne pas être ressuscité. Or, il s’agit là de mécréance à l’unanimité des musulmans. Cependant, cet homme était ignorant et ne savait pas cela. Il était croyant et craignait qu’Allah ne le châtie et c’est pourquoi Allah lui pardonna. Par conséquent, la personne apte à accomplir un effort d’interprétation et qui s’attèle à suivre la Sunna est plus à même de se voir pardonnée que la personne mentionnée dans le hadith. »

Quant à la personne dont le statut de mécréant est avéré avec certitude, elle peut être interpellée en lui disant : « O mécréant. » Toutefois, il n’y a généralement aucun intérêt à le faire particulièrement en ce qui concerne la personne dont on peut espérer qu’elle revienne à la vérité. En effet, il convient de faire preuve de sagesse de de veiller à instruire les gens et à les prêcher plutôt que d’accorder de l’importance à porter un jugement sur eux.

Comme mentionné précédemment dans les paroles du cheikh Ibn ‘Uthaymîn, juger quelqu’un mécréant implique certaines règles pouvant être liées à sa relation avec un individu, et l’intérêt est donc individuel, ou pouvant être liées à sa relation avec la communauté, et l’intérêt est donc dans ce cas communautaire.

En principe, on juge les gens d’après leur situation apparente. Celui qui paraît donc pieux doit être traité comme tel jusqu’à preuve du contraire. ‘Umar ibn al-Khattâb, qu'Allah soit satisfait de lui, a dit : « La Révélation est désormais achevée et nous vous jugerons dorénavant d'après les faits qui nous apparaissent. Celui donc qui paraît bon, nous le considèrerons digne de confiance et nous le prenons pour allié sans juger de son for intérieur, car il appartient à Allah Seul d'en juger.
Quant à celui qui parait mauvais, nous ne lui ferons pas confiance et nous ne considèrerons pas véridiques ses propos, même s'il déclare être bon en son for intérieur. » (Boukhari)
Celui donc qui fait montre d’une croyance corrompue, une innovation ou tout autre égarement doit tout d’abord être conseillé. Il faut lui prêcher et lui expliquer la vérité dans l’espoir qu’il se repente. Ensuite, s'il s’y refuse et persiste dans son égarement, il devient alors obligatoire d’expliquer sa situation aux gens afin que ces derniers se méfient de lui. Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) : « C'est ainsi que Nous détaillons les versets, afin qu'apparaisse clairement le chemin des criminels. » (Coran 6/55). Al-Sa’dî a dit dans son exégèse de ce verset : « Lorsque le chemin des criminels apparaît clairement, il devient alors possible de l’éviter et de s’en éloigner, contrairement au cas où il est équivoque et ambigu, car dans ce dernier cas, ce noble objectif (la bonne orientation) ne peut être atteint. »

Et Allah sait mieux.

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