Les dispositions régissant certains contrats et certaines ventes à l’époque contemporaine (III)

26/03/2013| IslamWeb

Nous traiterons dans ce troisième article concernant les dispositions régissant certains contrats et certaines ventes à notre époque : la vente du local évacué, le contrat dit de salam et enfin d'al-istisnâ’ ou demande de fabrication.
 

Vente du local évacué :
Cela a plusieurs formes
Première forme : ayant besoin d'argent pour développer sa propriété, le propriétaire paye une indemnité au locataire en contrepartie de son évacuation du local, par exemple. Cela est permis, car il s’agit de la vente d’une partie, non subordonnée à quoi que ce soit, d’un profit.
La deuxième forme : le propriétaire prend de l’argent du locataire en contrepartie de l’évacuation du local en raison du fait que les lois limitent son droit de louer sa propriété à un prix équivalant à celui pratiqué dans un cas similaire et l’astreignent à une tarification obligatoire ou limitent son droit de faire évacuer le résident à la fin de la période.
Il arrive parfois que les prix du tarif changent en raison de l'inflation de la monnaie papier et alors le propriétaire choisit de prendre la contrepartie de l’évacuation pour compenser. Cela est autorisé aussi parce qu'il est destiné soit à permettre au locataire d’avoir le local soit parce que cela fait partie de la compensation pour avoir un profit même si, au fond, il n’en constitue qu’une partie séparée.
La troisième forme : le contraire, c'est-à-dire que le locataire reçoit la contrepartie du local évacué de la part du propriétaire et cela dans deux cas :
A- En contrepartie de l’évacuation par le locataire de l'immeuble, car il lui reste une partie de la durée de son contrat et il cherche à en être compensé.
B - En contrepartie de l’indemnité de l’évacuation déjà payée à un locataire précédent auquel le nouveau propriétaire propose d’évacuer le local et qu’alors il va lui rembourser ce qu’il a payé en plus de lui donner une compensation pour l’évacuation.
C’est une compensation légale dans les deux cas.
La quatrième forme : le locataire prend l'indemnité de l’évacuation d’un locataire futur et cela dans deux cas aussi :
A- Il se trouve qu’il y a un reste de la durée du contrat et alors le nouveau dit : renonce et je te fais une compensation. Cela est permis.
B - Les lois permettent à l’ancien locataire de contraindre le propriétaire à renouveler le contrat chaque fois que celui-ci prend fin et alors le nouveau locataire dit : je suis prêt à renoncer à ce droit bien que je sois en mesure de contraindre le propriétaire à me renouveler le contrat. Je vous laisse l’immeuble en échange d'une contrepartie. Cela n’est pas permis parce qu’il a donné une compensation pour obtenir un droit, du reste, illégal.

Le contrat de salam :

Le contrat dit de salam est un contrat de vente d’un article décrit, non présent mais soumis à la responsabilité de son vendeur. En d’autres termes cela signifie que l'acheteur donne le prix à l'avance et que le vendeur présente un produit décrit et soumis à sa responsabilité et qui, même s’il n’est pas actuellement disponible, il le sera à un moment mutuellement convenu entre les deux car le délai doit être impérativement précisé et le prix remis au complet dans la séance où a lieu le contrat sans qu’il n’en reste aucun reliquat. 
Le vendeur bénéficie d’un financement disponible en espèces et l’acheteur aussi bénéficie dans la mesure où souvent il achète à un prix inférieur au moment où le produit est disponible. Par exemple, s'il achète 100 sâ'-s de dattes en vertu d’un contrat de salam il l'obtient à un prix inférieur lorsqu’il se rend au marché dans son heure habituelle.
Le contrat de salam ne doit pas porter sur deux objets soumis à l’usure par payement différé. Ainsi, il n'est pas permis entre l'or et l'argent ni entre les devises parce que cela conduit à l'usure.

Comment les banque islamiques peuvent-elles bénéficier du salam?
Les banques islamiques pratiquent maintenant le contrat de salam sous certaines formes. Quel en est l’avis de la Charia:
Première forme : la banque islamique achète des marchandises en vertu du contrat de salam ce qui les rend moins chères pour elle. Supposons qu’elle les prenne à l'heure convenue, et que chaque société commerciale lui fasse commercialiser le produit en échange d'un pourcentage des bénéfices, étant bien sûr entendu que les commerçants peuvent se charger de tout le processus depuis le début en payant les prix par avance et en prenant les marchandises à temps pour les faire commercialiser en échange d’un certain pourcentage, alors cela est permis parce que c'est une procuration en échange d’un prix même s’il soulève une problématique à savoir la question de ‘la mesure du moulinier’.
Il s’agit d’un problème célèbre et qui se pose ainsi : tu donnes au moulinier un kilogramme d'orge et tu lui dis que son salaire sera le quart du kilo de celui-ci. Certains oulémas ont interdit ce genre de transactions en s’appuyant sur le hadith (le Prophète a interdit la mesure du moulinier), (Rapporté par al-Daraqutnî mais c’est un hadith faible). Ils font valoir qu’il y a de la farine méritée de part et d’autre selon ce que chacun doit à l'autre. Mais ce qui est correct c’est que cela est permis faute de la preuve du contraire.
La deuxième forme : la banque islamique achète auprès d'un vendeur en vertu du contrat de salam et lui donne une procuration selon laquelle le vendeur se charge lui-même de commercialiser la marchandise.
Il s'agit d'un problème grave, car il ouvre la porte de l'usure et ce sera alors comme s’il s’agit d’un financement par prêt en contrepartie d'un intérêt. Dans ce cas le contrat de salam serait tout simplement fictif.
La troisième forme : la banque islamique procède, à la fin du délai, à la vente au vendeur lui-même c'est-à-dire qu’après les échéances convenues pour la livraison des marchandises, elle dit au client auquel elle a vendu la marchandise : voilà je te la vends une deuxième fois. Même si la vente qui intervient avant l'entrée en possession de l’objet vendu, cela est permis sous réserve toutefois que le nouveau prix corresponde à celui du jour où a lieu le règlement avec une valeur égale sinon inferieure à la précédente afin que l’acheteur ne gagne pas plus que ce qu’il a garanti. Ce point de vue est celui favorisé par Ibn Taymiyya et Ibn al-Qayyim et il correspond à la version de l'imam Ahmed, car dans ce cas la banque ne peut être accusée de faire un prêt apportant un avantage. Si l’on rétorque que la banque ne gagne rien si elle vend avec une valeur égale sinon inférieure à la précédente on rétorquera qu’alors il ne lui est pas permis d’ouvrir, par fraude, une porte qui conduit à l'usure.
La quatrième forme : en vertu d’un contrat de salam la banque vend des marchandises à un tiers avant d’en prendre possession. Cela n'est pas permis en raison de son interdiction par le prophète ().
La cinquième forme : le contrat parallèle de salam qui consiste à ce que la banque islamique vende à un tiers, autre que celui avec lequel elle a conclu le premier contrat de salam. Donc elle vend à ce nouveau en vertu du même salam que pour le premier contrat et pour les mêmes caractéristiques aussi, mais pas pour la même première marchandise et elle reçoit le prix à l'avance. Au total, elle a remis au premier un montant et a reçu du deuxième un montant qui, pour lui permettre de bénéficier, doit être supérieur. À l’échéance du délai il reçoit les marchandises du premier et les remet au deuxième. Est-ce permis ?
Il n'y a pas islamiquement de mal à cela parce qu’il y a deux contrats légaux. Ici se pose tout de même une question importante à savoir s’il est permis à la banque islamique de transférer ce que lui doivent certains clients au titre du prix du salam et dans ce cas, le prix sera bien sûr, très peu cher. Cela n'est pas permis parce qu'il s’agit de la vente d’arriérés par des arriérés.

Al-istisnâ’ : Demande de fabrication

Al-istisnâ' (Demande de fabrication) : il s’agit d’une demande qu’une partie adresse à une autre à l’effet de lui fabriquer, en contrepartie d’une compensation et conformément aux caractéristiques spécifiques, un produit non encore fabriqué en utilisant des matériaux provenant du fabricant.
Ce qui nous préoccupe ici c'est ce qu'on appelle :
Al-istisnâ' parallèle : c’est le fait qu’une partie prend contact avec la banque islamique pour conclure avec elle un contrat d’al-istisnâ' et alors la banque fait une commande aux spécialistes dans le domaine pour qu’ils lui fabriquent le produit demandé.
Lorsque la banque reçoit ledit produit ainsi fabriqué elle le remet à ceux qui l’on demandé. Est-ce que cela est permis ?
Oui cela est permis, à condition toutefois que le travail de la banque ne se transforme pas en travail fictif ce qui signifie que l'acheteur procède à la deuxième fabrication également, la supervise et prend possession de la marchandise de sorte que le rôle de la banque se limite à la signature des papiers. On dirait presque qu’elle fait un prêt à intérêt en usant des subterfuges.

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