Les demandes de protection prophétiques contre huit maux

10/08/2025| IslamWeb

 

Les demandes de protection prophétiques contre huit maux

 

 

Celui qui passe en revue les invocations du Prophète () peut être arrêté par des paroles et des expressions à la portée globale. Il se rend compte que l’invocation prophétique comprend des indications spirituelles et pédagogiques. Et parmi ces invocations, il y a des demandes de protection du Prophète () adressées à son Seigneur. Il a sollicité la protection divine contre de nombreux méfaits, dans diverses situations et autres difficultés. Une des plus célèbres est la demande de protection contre les huit maladies. Et nous allons nous arrêter un instant sur quelques-unes de ces significations et ce que nous dit la relation qui les lie.

Dans le recueil de Boukhari, selon Anas ibn Malik, qu’Allah soit satisfait de lui : le Prophète () dit à Abu Talha : « Trouve-moi un de vos jeunes qui puissent me servir jusqu’à ce que j’aille à Khaybar. » Abu Talha me prit en croupe alors que j’étais à peine pubère. J’étais donc au service du Messager d’Allah (). Lorsqu’il descendait, je l’entendais souvent invoquer en ces termes :

« Ô Allah Puisses-Tu me préserver de l’angoisse et de la tristesse, de l’impuissance et de la paresse, de la lâcheté et de l’avarice, du poids des dettes et de l’injustice des hommes. (Allahumma innî a'oudhou bika min al-`adjzi wa al-kasal, wa al-boukhl, wa al-djubni, wa dala'i ad-dayni wa ghalabati ar-rijâl). »

Ces huit maux atteignent le cœur qui en est affecté et peuvent même le rendre malade, et même mettre fin à sa vie (spirituelle) et couper le lien par lequel il subsiste. Et c’est ce qui fait que cette situation est si grave. Il est donc bienvenu que le fidèle cherche les causes de ces maladies et les moyens de les repousser.

Ibn Al-Qayyim considère que ces huit maux sont des châtiments pour les péchés commis par le fidèle. Et celui qui ne médite pas les lois universelles d’Allah relatives aux châtiments et aux épreuves pourrait ne pas prêter attention à cela. En effet, le fidèle est conscient de son angoisse et de sa tristesse, de son incapacité et de sa paresse, et du reste de ces maux. Mais il les interprète de façon superficielle sans les lier à leurs causes et à leurs prémices.

Ibn Al-Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit dans son livre Al-Jawâb Al-Kâfî, dans le cadre de l’énumération des châtiments des péchés : « Autre effet néfaste des péchés : ils ralentissent le croyant dans son cheminement vers son Seigneur et vers l'au-delà, ou font obstacle à sa progression ou lui barrent tout simplement la route. Ils l'empêchent donc d'aller de l'avant et de se rapprocher d'Allah quand ils ne l'obligent pas à faire marche arrière. Le péché immobilise donc celui qui progresse et s'interpose entre lui et le but qu'il s'est fixé. En effet, le cœur chemine vers Allah par la force qui est en lui. Or, lorsque le cœur tombe malade à cause des péchés, la force qui l'anime faiblit. Et si cette force disparaît entièrement, il s'éloigne à tel point d'Allah qu'il lui est bien difficile de revenir. Mais c'est en Allah seul qu'il faut chercher aide.

Le péché peut, en effet, soit causer la mort du cœur, soit provoquer en lui une maladie mortelle, soit encore l'affaiblir. Et il ne retrouvera sa force que si le serviteur d'Allah se préserve de ces huit maux contre lesquels le Prophète () a imploré la protection d'Allah. »

Une des merveilles de l’invocation prophétique est qu’il a cité par paire de deux maux qui sont conjoints au niveau de leur sens.  Il a cité conjointement l’angoisse et la tristesse, l’incapacité et la paresse, et ainsi de suite. Le cœur est déstabilisé par deux types de choses : celles qui se sont déjà produites qui provoquent sa tristesse, et celles qu'il redoute dans l'avenir qui provoquent son angoisse. Et la plupart du temps, le fidèle est atteint par ces deux maux pour deux raisons : l’avidité pour ce bas monde et la négligence des droits d’Allah. Et par leurs inverses, la tristesse se dissipe et les angoisses prennent fin. C’est pourquoi on trouve cette citation dans le Mu’jam de Al-Tabarânî : « Renoncer à ce monde repose le cœur et le corps. »

Ceci explique la situation de nombreuses personnes qui sont constamment touchées par l’angoisse et la tristesse. Alors que ce sont des gens qui peuvent vivre dans des conditions matérielles aisées et posséder des richesses, mais ils ont perdu cette qualité de se contenter de ce qu’ils ont et d’être satisfaits de ce qu’Allah leur a donné. Et si en plus de cela ils commettent des péchés et sont négligents face aux obligations divines, alors ils n’auront fait qu’appeler à eux angoisse et tristesse en mettant en œuvre les meilleurs moyens pour ce faire.

L’impuissance et la paresse vont de pair également. L’impuissance se manifeste lorsque l’homme perd sa capacité à agir et la paresse lorsqu’il perd toute volonté d’agir. Or, ce sont là les deux portes de la privation du bien, le chemin de la perte et de la négligence. Dans son ouvrage Miftâh Dâr Al-Sa’âda, Ibn Al-Qayyim a dit : « L’impuissance peut être le résultat de la paresse et dans ce cas le fidèle peut être blâmé également puisque souvent, l’homme a la flemme de faire ce qu’il est tout à fait capable de faire, mais qu’il ne fait pas parce que sa volonté est trop faible et de ce fait, il en devient impuissant. Et c’est cette impuissance qu’Allah blâme. Quant à celle pour laquelle Allah ne lui a pas donné les moyens de s’en défaire, elle n’est pas à blâmer.

 

La lâcheté et l’avarice vont également de pair. Si le fidèle ne peut pas se rendre utile physiquement alors c’est un lâche. Et s’il ne peut se rendre utile par ses richesses alors c’est un avare. En effet, en islam, l’homme se construit sur un état d’esprit positif et de don de soi à travers les efforts qu’il consent à fournir physiquement et par ses richesses dans le chemin d’Allah. Mais, il se peut que l’amour de ce bas monde prenne une place importante dans son cœur ce qui l’empêcherait de faire ce qui lui incombe pour prendre fait et cause et soutenir la vérité physiquement ce qui en ferait un lâche. Ou il pourrait refuser ce qui relève du droit d’Allah et retenir ses richesses ce qui en ferait un avare. Et ces deux maux coupent le serviteur de ce qu’il devrait faire. Ce sont deux maux qui le laissent alité et l’empêchent de se tenir debout pour accomplir ses obligations en matière de soutien de la vérité et de bienfaisance.

Ces deux maux peuvent se réunir chez une même personne qui serait alors lâche et avare, sans que rien ne les lie. D’ailleurs, certaines personnes sont généreuses de leurs biens et de leurs personnes. D’autres avares de leurs biens, mais généreuses de leur personne. Et d’autres généreuses de leurs biens, mais mesurées avec leur personne. Toutes ces catégories existent. Et la meilleure est celle qui est utile par ses biens et sa personne.

Concernant le poids des dettes et l’injustice des hommes, la raison pour laquelle leur sens est conjoint s’explique justement parce que les dettes conduisent à subir l’injustice des hommes lorsqu’ils ne sont pas en mesure de les régler. Al-Munâwî a dit dans Fayd Al-Qadîr : « Le poids des dettes et l’injustice des hommes sont liés puisque si un homme exerce une pression sur le fidèle de plein droit cela correspond au poids des dettes et si c’est injustifié alors il s’agit de l’injustice des hommes. »

L’injustice des hommes advient parce que le fidèle est distrait du fait que c’est Allah qui prédestine les choses et les administre. Il commence alors à interpréter l’autorité des hommes sur sa personne par des causes matérielles et oublie de solliciter l’aide d’Allah qui est capable de mettre un terme à leurs méfaits. C’est Lui qui tient dans Sa main leur toupet. Ils ne peuvent ni précipiter un fait ni le retarder si ce n’est selon ce qu’Il a décrété. C’est à cette signification qu’Al-Munâwî fait référence quand il reproduit les propos d’un fin connaisseur de la spiritualité à l’endroit même où il explique ce hadith : « La compréhension des propos prophétiques nous oblige à faire preuve de minutie pour connaitre ce qu’ils recèlent de secrets latents. Il ne faut pas s’arrêter sur le sens apparent des termes. Le fidèle qui est en mesure d’analyser la profondeur des faits cherchera à déterminer quelle est la cause qui a conduit à l’injustice des hommes. Il constatera que cela est dû au voile qui l’empêche de constater qu’Allah est Celui qui en réalité les fait se mouvoir jusqu’à ce qu’ils se montrent injustes envers le fidèle. C’est alors que notre fidèle revient à son Seigneur qui le protège de leur injustice. Ceci, alors que celui qui ne fait attention qu’aux apparences ne voit pas que tout cela émane du bon vouloir d’Allah, et pas des hommes. Le fidèle dans cette situation n’a de cesse de subir leur injustice, alors que s’il voyait de son cœur que ces actes émanent de par la volonté divine, leur injustice cesserait et il serait satisfait du jugement d’Allah. En somme, la demande de protection n’est pas autre qu’une demande de protection contre la cause de l’injustice qui est ce voile qui empêche le fidèle de constater la raison profonde des choses.

Invoquer Allah et chercher refuge auprès de lui, solliciter Sa protection contre ces maux. Tout cela est une méthodologie prophétique. D’ailleurs, le Prophète () enseignait à ses compagnons ce principe consistant à se réfugier auprès d’Allah en cas d’angoisse et de dettes.

Selon Abu Said Al-Khudrî: « Un jour, le Prophète () est entré à la mosquée où se trouvait un homme des Ansars qui s’appelait Abu Umâma. Et alors qu’il était assis, il lui dit : « Ô Abu Umâma, qu’ai-je à te voir assis alors que ce n’est pas l’heure de la prière ? » Il répondit : « Je suis angoissé et accablé par les dettes ô messager d’Allah. Ce à quoi il dit : « Ne veux-tu pas que je t'enseigne des paroles par lesquelles, si tu les prononces, Allah Tout-puissant dissipera ton angoisse et fera disparaître tes dettes ? Dis, le matin et le soir : "Ô Allah ! Je cherche refuge auprès de Toi contre l'angoisse et la tristesse, l'impuissance et la paresse, la lâcheté et l'avarice, contre le fait de crouler sous les dettes et d'être dominé par les hommes". »

Abu Umâma a dit : « J'ai agi ainsi et Allah Tout-puissant a dissipé mon angoisse et a fait disparaître mes dettes. »

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