Hadith concernant les gens qui ne demandent à personne de les soigner par la ruqya

25-3-2014 | IslamWeb

Question:

Salam alaykum,
Ma question porte sur l'explication d'un hadith ayant trait à la rokya, la cautérisation et la pleine confiance en Allah. Ibn ‘Abbas (RA) a dit : « Le Messager de Dieu saws a dit : « On a fait défiler devant moi les communautés religieuses (ou nations). Je vis alors un tel prophète et avec lui moins de dix adeptes, tel autre avec un ou deux partisans et un tel autre n’en ayant aucun. Tout à coup on éleva vers moi une foule énorme et je crus que c’était ma communauté. Mais on me dit : « Voilà Moïse et sa nation. Regarde plutôt à l’horizon ». Je regardai et vis apparaître des masses innombrables. On me dit alors ; « Regarde de l’autre côté de l’horizon » et voilà surgir une foule immense. « C’est tout cela ta nation et, avec elle, soixante-dix mille hommes qui entreront au Paradis sans subir aucun jugement et aucun tourment ». Puis il se leva et rentra chez lui. Les gens se mirent alors à conjecturer sur ces bienheureux qui entreront au Paradis sans jugements ni tourments. Certains dirent : « C’est sans doute ceux qui ont été les compagnons du Prophète (saws) ». D’autres dirent : « Ce sont peut-être ceux qui sont nés en Islam et n’ont ainsi jamais rien associés à Dieu ». On fit d’autres supputations. C’est alors que le Messager de Dieu (saws) se présenta à eux de nouveau et leur dit : « A propos de quoi discutez-vous ainsi ? » Ils lui dirent l’objet de leurs discussions et il dit : « Ce sont plutôt ceux qui ne soignent pas par les incantations et ne se font pas soigner par elles. Ceux qui ne croient point au mauvais augure et qui s’en remettent en tout à leur Seigneur ». Juste à ce moment se leva ‘Oukkâsha Ibn Mohsin qui dit : « Prie Dieu pour que j’en sois ! » Il lui dit : « Tu es effectivement l’un de ceux-là ». Quelqu’un d’autre se leva pour faire la même demande. Il lui dit : « C’est là une faveur où t’a déjà précédé ‘Oukkaâsha » (URA) Plusieurs versions de traduction ou d'interprétation de ce hadith existent, notamment concernant la partie "ceux qui ne soignent pas par les incantations et ne se font pas soigner par elles" mais aussi concernant la cautérisation où elle est citée: D'après Abdallah Ibn Abbas (qu'Allah l'agrée), le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) a dit: « 70 000 personnes de ma communauté vont rentrer dans le paradis sans jugement, ce sont ceux qui ne demandent pas qu'on leur fasse rouqiya, qui ne pratiquent pas les augures, qui ne pratiquent pas la cautérisation et font confiance à leur Seigneur ».
(Rapporté par l'imam Boukhari dans son Sahih n°6472 et par l'imam Mouslim dans son Sahih n°218)
Aussi, pourriez-vous m'apporter un éclairage quant à l'explication de cette partie du hadith ? Qui sont ceux décrits ? Ceux qui se font la rokya eux-mêmes, ceux qui demandent à quelqu'un d'autre de leur faire, ou est-ce également les personnes qui pratiquent la rokya sur les autres ? Quel comportement adopter alors face à la rokya, doit-on éviter de la demander ?
De plus, la question se pose si on a déjà sollicité autrui pour des rokyas, sort-on du cadre de ce hadith et du coup ne peut-on pas espérer faire partie de ces personnes ?
Autre point concernant la cautérisation : quelle est la raison pour laquelle la cautérisation est ici évoquée ? De même, aujourd'hui la circoncision de nos fils se fait par cautérisation (laser) ainsi que certains soins dermatologiques (brûlures par l'azote pour verrues etc...), qu'en est-il au regard de ce hadith ? BarakAllahoufikom pour votre réponse.

Réponse:

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses compagnons :

Les oulémas divergent quant à ce que désignent les gens qui ne demandent à personne de les soigner par la ruqya. Il est dit que cela désigne les gens qui ne demandent à personne de les soigner par la ruqya à la manière des gens de l’époque préislamique qui croient que les médicaments sont en eux-mêmes bénéfiques et qui ne s'en remettent pas à Allah. Tel est l'avis d'Ibn Hibbân dans son Sahîh. Il est dit aussi que cela désigne ceux qui ne demandent pas à autrui de pratiquer la Ruqya sur eux en raison de leur confiance totale en Allah et du fait que leur cœur est attaché à Lui. Tel est l'avis retenu par l'imam al-Nawawî dans son commentaire sur le Sahîh de Mouslim.

Partant de cela, il ne fait aucun doute que celui qui demande à quelqu'un de pratiquer sur lui la Ruqya, en ayant le cœur attaché à celui qui pratique la Ruqya, n'est pas compris dans ces soixante-dix-mille personnes. Par contre, celui qui demande à quelqu'un de pratiquer la Ruqya sur lui, tout en plaçant sa confiance en Allah, exalté soit-Il, et en ayant la conviction que la personne pratiquant la Ruqya n'est qu'une cause, alors cette demande de sa part ne l'empêche pas de faire partie de ces soixante-dix-mille personnes, selon l'avis d'Ibn Hibbân.

Concernant les personnes qui pratiquent la Ruqya, elles ne sont pas visées par ce hadith. Quant aux versions de ce hadith mentionnant que ceux qui font partie de ces soixante-dix-mille personnes ne pratiquent pas la Ruqya, ces mentions que l’on trouve dans ces différentes versions ont été décrites par le cheikh al-Islâm comme étant illusoires et erronées, en affirmant que seule la version mentionnant les gens qui demandent qu'on leur fasse la Ruqya est authentique.

Concernant la Ruqya conforme aux préceptes de la Charia, elle est autorisée à l'unanimité des oulémas tout comme il est permis de demander à quelqu'un qu’il pratique sur nous la Ruqya, même s'il est préférable de ne pas le faire comme l'indique le hadith.

Quant à celui qui a, dans le passé, demandé à ce que l'on pratique sur lui la Ruqya puis l'a regretté, le Cheikh 'Abd Al-Muhsin al-'Abbâd a été questionné à ce sujet lors de son commentaire du Sunan d'al-Tirmidhî. On lui a demandé : « La personne qui, dans le passé, a demandé à ce que l'on pratique sur elle la Ruqya ou la cautérisation et s'en est repentie, fait-elle partie de ces soixante-dix-mille personnes ? » Le Cheikh répondit : « Elle est dans le bien et Allah sait mieux. »

Concernant la cautérisation, l'utilisation du laser comme une forme de traitement ou de chirurgie médicale n'est pas considéré comme de la cautérisation, en raison de la différence qui existe entre les deux remèdes.

Enfin, concernant la raison pour laquelle il est fait mention de la cautérisation dans le hadith, le dictionnaire arabe intitulé Lisân al-'Arab mentionne ce qui suit :

« La cautérisation par le feu est un traitement connu dans le cas de nombreuses maladies. De nombreux hadiths interdisent la cautérisation. On dit que la cautérisation a été interdite en raison du fait que les gens exagéraient le pouvoir de ce traitement et qu'ils pensaient qu'il mettait fin à la maladie. Ils pensaient que si un membre du corps n'était pas cautérisé, il devenait alors endommagé et inopérant.
C'est pourquoi l'Islam interdit la cautérisation de ce point de vue, mais l'autorise lorsqu'elle est utilisée comme cause de guérison sans croire qu’elle a un pouvoir de guérison en soi. En effet, Allah, exalté soit-Il, est Celui qui guérit et non la cautérisation ou le médicament. C'est là une chose dont beaucoup de gens doutent. Ils disent : "S'il avait pris ce médicament, il ne serait pas mort, s'il était resté dans son pays, il n'aurait pas été tué et s'il s'était fait cautériser, il ne serait pas invalide."
On dit aussi qu'il est possible que l’interdiction de la cautérisation vaille lorsqu'elle est pratiquée par prévention contre les maladies et avant d'en avoir besoin, car cela est détestable. En effet, il est permis de se soigner et de suivre un traitement au moment où l’on en a besoin. Il est également possible que l'interdiction de la cautérisation soit une incitation à placer sa confiance en Allah comme dans la parole du Prophète () :

"Ce sont ceux qui ne demandent à personne de les soigner par Ruqya, qui ne se soignent pas par cautérisation et qui s’en remettent en tout à leur Seigneur." La confiance en Allah est un haut niveau de la foi et elle n’est en contradiction avec la permission. » Fin de citation

Et Allah sait mieux.

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