Espérer écrire le Coran à la main permet-il d’obtenir la récompense de ceux qui le liront ?

31-1-2022 | IslamWeb

Question:

J’ai reçu une lettre qui disait : « Quiconque espère sincèrement faire le bien recevra sa récompense d’Allah. Dans le hadith il est dit : « Un homme qui a une intention sincère dit : si j’avais de l’argent j’aurais fait comme untel. Ainsi il aura la même récompense que cette personne en raison de sa bonne intention. »
Savez-vous que les exemplaires du Coran qui sont imprimés ont d’abord été écrit à la main, puis ont été imprimé en des millions d’exemplaires. Le scribe qui l’a écrit de sa main s’appelle Ta-Ha Uthman.
Imaginez si vous nourrissez l’espoir d’accomplir cette action ! Combien de milliards de bonnes actions seront inscrits à votre actif et quelle récompense recevrez-vous ! On pourrait citer encore beaucoup d’exemples. Partagez cette lettre et diffusez-la autour de vous et vous serez récompensés. »
Est-ce que le contenu de cette lettre est exact ? Si j’émets l’intention d’accomplir la même œuvre que le scribe Ta-Ha Uthman, celui qui a écrit le coran de sa main, est-ce que j’obtiendrai la récompense de tous ceux qui liront le coran qui a été imprimé à des millions d’exemplaires ? Qu’Allah vous bénisse.

Réponse:

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :


Le contenu de la lettre que vous avez reçu n’est pas tout à fait exact. Espérer uniquement faire du bien n’est pas une cause suffisante pour obtenir la récompense. Pour cela, il faut absolument avoir la ferme intention de faire cet acte de bien puis, si on n’est pas en mesure de la faire alors on obtient la récompense de cet acte d’obéissance. Voici quelques propos des savants à ce sujet :
Dans son ouvrage Jâmi’ Al-‘Ulûm Wa Al-Hikam, Ibn Rajab a dit : « Il a été rapporté de Said ibn Al-Mussayyab : « qui a l’intention de prier, jeûner, faire un pèlerinage, hajj ou Omra, participer aux combats, et qu’un évènement vienne s’interposer entre lui et l’œuvre qu’il avait l’intention d’accomplir alors Allah lui fera parvenir la récompense de cette œuvre. »
Quand une parole ou un acte est accompagné d’une bonne intention alors la récompense est garantie. Et le fidèle est élevé au niveau de celui qui a effectivement accompli cette œuvre. Ceci, comme l’a rapporté Abu Kabsha du Prophète, , qui a dit :
« Les hommes sont de quatre catégories : Il y a d’abord celui à qui Allah a accordé richesse et savoir. Il craint donc Allah dans la manière de dépenser ses biens, reconnaissant les droits d’Allah et ceux de ses proches. Celui-ci occupe le rang le plus élevé. Il y a ensuite celui à qui Allah a accordé le savoir, mais sans la richesse. Son intention est sincère lorsqu’il dit : “Si j’étais riche, j’agirais comme untel”. Par son intention, il obtiendra la même récompense que le premier. Vient ensuite celui à qui Allah a accordé la richesse, mais qu’Il a privé de savoir. Il dépense ses biens sans savoir et sans craindre Allah, ne reconnaissant ni les droits du Seigneur, ni ceux de ses proches. Celui-là occupe le pire des rangs. Pour finir, il y a celui à qui Allah n’a accordé ni richesse, ni savoir. Il dit : “Si j’étais riche, j’agirais comme untel”. Par son intention, il commet le même péché que le précédent. » Rapporté par Ahmad et Ibn Mâjah et Tirmidhi dont c’est la version.
On doit comprendre la parole prophétique : « il obtiendra la même récompense que le premier » dans le sens où ils ont initialement la même récompense. Mais il n’est pas question ici que la récompense soit décuplée (comme il est dit dans certains hadiths). En effet, le fait que la récompense d’un fidèle soit décuplée est spécifique à ceux qui ont effectivement mis en pratique une œuvre et ne concerne pas ceux qui ont eu uniquement l’intention de la faire. Si ces deux personnes obtenaient la même récompense de tout point de vue, celui qui a eu l’intention de faire une bonne action sans la mettre en pratique se serait vu inscrire la récompense de dix bonnes actions. Or, cela va à l’encontre de tous les textes sur ce sujet. Pour preuve, ce verset : « Allah a élevé le rang de ceux qui luttent corps et biens par rapport à ceux qui demeurent dans leurs foyers. Mais à chacun Il a promis la plus belle récompense, privilégiant toutefois ceux qui se sacrifient par rapport à ceux qui restent dans leurs foyers, en accordant aux premiers une immense récompense : de hautes demeures au Paradis. » (Coran 4/95)
Ibn Abbâs et d’autres ont dit : « Allah a privilégié ceux qui ont lutté corps et biens par rapport à deux catégories de personnes : ceux qui sont restés dans leurs foyers parce qu’ils disposaient d’une excuse. Il les a privilégiés en leur accordant une belle récompense. La deuxième ceux qui sont restés dans leurs foyers et ne disposent d’aucune excuse. Il les a privilégiés en leur accordant une immense récompense : de hautes demeures au Paradis. » Fin de citation en résumé.
Dans son ouvrage Al-Tanwîr Fî Sharh Al-Jâmi’ Al-Saghîr, Al-San’ânî explique : « L’homme qui a reçu savoir et richesse qu’il a dépensée a la même récompense que celui qui a reçu le savoir mais sans richesse pour la dépenser. Ceci dit, ce dernier avait la ferme intention de la dépenser au cas où il aurait possédé une richesse. Ces deux hommes auront donc la même récompense. Ils sont égaux en terme de savoir et égaux en terme de dépenses. Le premier en ayant effectivement dépensé sa richesse et le deuxième en ayant eu la sincère intention de le faire. Allah a donc décrété que la récompense de qui a eu une intention sincère de dépenser était la même que celui qui a eu l’intention et qui a aussi mis en œuvre son intention.
Si on objecte : il est rapporté de source sûre que celui qui a l’intention de faire une bonne action, c’est-à-dire dans notre cas dépenser de sa richesse, lui sera inscrit une bonne action. Et s’il la met effectivement en œuvre, il lui en sera inscrit dix. Alors comment peut-on mettre à égalité celui qui a juste eu l’intention de faire une bonne action et celui qui l’a effectivement accomplie ?
A cela nous répondons : Ceci prouve que celui qui avait l’intention sincère de faire une bonne action quelle qu’elle soit, puis qui a été incapable de la faire pour une raison l’en empêchant aura la même récompense que celui qui aura pu la faire. C’est ce qu’implique la grâce d’Allah et sa justice. Celui qui avait une intention sincère n’a pu mettre en œuvre son intention uniquement parce qu’Allah ne lui a pas accordé suffisamment de largesses. C’est donc uniquement ce qui lui a été prédestiné qui s’est interposé en tant qu’obstacle à la mise en œuvre de son intention. Ce hadith appuie nos propos : « Il y a des hommes à Médine qui, à chaque trajet que nous avons effectué et à chaque vallée que nous avons traversée, étaient à nos côtés. Ils avaient, en effet, des raisons valables de ne pas nous accompagner. »
Le Prophète, , a tenu ces propos dans une de ses batailles. Il a donc mis sur un pied d’égalité ceux qui avaient une excuse et ceux qui ont pu participer aux combats. C’est ce que dit le verset suivant :
« Les croyants qui s’abstiennent de combattre - à l’exception de ceux qui en sont dispensés [Les infirmes et les malades notamment.] - ne sauraient égaler ceux qui sacrifient leurs biens et leurs vies pour la cause d’Allah. Allah a élevé le rang de ceux qui luttent corps et biens par rapport à ceux qui demeurent dans leurs foyers. Mais à chacun Il a promis la plus belle récompense, privilégiant toutefois ceux qui se sacrifient par rapport à ceux qui restent dans leurs foyers, en accordant aux premiers une immense récompense : de hautes demeures au Paradis. » (Coran 4/95)
Il a donc excepté ceux qui en sont dispensés, les infirmes et les malades, et les a mis sur un même plan que les participants aux combats.
Ceci étant dit, nous savons que le hadith du fidèle qui a eu l’intention d’accomplir une bonne action concerne celui qui a effectivement la capacité de l’accomplir.
Plus loin il poursuit en disant :
Qui avait l’intention sincère de faire une bonne action quelle qu’elle soit, puis qui a été incapable de la faire pour une raison l’en empêchant aura la même récompense que celui qui aura pu la faire. C’est ce qu’implique la grâce d’Allah et sa justice. » Fin de citation.
Dans Majmû’ Al-Fatâwa, Shaykh al-Islam ibn Taymiyya a dit : « Il en est de même d’un homme qui fait de son mieux pour accomplir une œuvre complétement sans y parvenir alors que s’il en avait eu la possibilité il l’aurait faite complètement. Il aura la même récompense que celui qui l’a complètement accomplie. » Fin de citation.
Dans son ouvrage Al-Mufhim Sharh Sahih Al-Imâm Muslim, Al-Qortobî a dit : « L’intention est à l’origine de tous les actes. Si on a la sincère intention d’accomplir une bonne action sans avoir la possibilité de la concrétiser en raison d’un empêchement, alors il n’est pas improbable qu’on obtienne la même récompense que celui qui a effectivement pu la faire, voire d’en avoir davantage. Ce qui nous prouve nos dires sont les hadiths suivants :
« L’intention du croyant est meilleure que son action. »
« Il y a des hommes à Médine qui, à chaque trajet que nous avons effectué et à chaque vallée que nous avons traversée, étaient à nos côtés. Ils avaient, en effet, des raisons valables de ne pas nous accompagner. »
Le texte le plus explicite à ce sujet est le hadith : « Les hommes sont de quatre catégories … » que nous avons cité précédemment.
Plus loin, il dit :
Certains imams sont d’avis que les exemples cités dans ces hadiths ne concernent pas les récompenses qui sont décuplées. Ils disent : En plus des actions citées dans ces hadiths, il y a de nombreux autres actes de bonté qui sont accomplies par ces fidèles que ceux qui ont uniquement eu l’intention de faire n’ont pas accomplis.
Mais celui qui a effectivement été incapable de mettre en œuvre son intention et avait pourtant la sincère intention de la mettre en œuvre, il ne devrait pas avoir de divergence sur le fait que sa récompense est lui aussi décuplée au même titre que celui qui l’a mise en œuvre. Et ce, en raison de ce que nous avons déjà évoqué. Et aussi, en raison du hadith rapporté par Nasâ’î selon Abu Al-Dardâ’ : le Prophète, , a dit : « Celui qui se met au lit en ayant l’intention de se lever la nuit pour prier et que le sommeil le gagne jusqu’au matin alors il aura la récompense de l’acte qu’il avait l’intention d’accomplir. Et son sommeil lui sera compté comme une aumône. » Fin de citation.
A partir de tout ce qui précède, le simple fait d’espérer accomplir la même œuvre que le scribe mentionné dans la question ne vous permet pas d’obtenir la récompense de la lecture de tous les exemplaires du Coran imprimés qui sont diffusés dans le monde.


Et Allah sait mieux.
 

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