S’endetter : des soucis la nuit et une honte le jour
Allah a partagé la subsistance entre Ses créatures :
« Il n’est pas de créature sur terre dont Allah n’assure la nourriture et dont Il ne connaisse le repaire et la dernière demeure. Tout ceci est consigné dans un livre parfaitement clair. » (Coran 11/6).
Allah a fait en sorte que Ses serviteurs soient de degrés différents concernant la subsistance. Ce faisant, cela procède d’une sagesse éloquente et de Ses signes éblouissants :
« Ton Seigneur dispense Ses faveurs à qui Il veut, comblant certaines de Ses créatures, accordant aux autres avec mesure. Il connaît parfaitement Ses serviteurs dont aucun secret ne Lui échappe. » (Coran 17/30).
Et comme Il le dit dans cet autre verset :
« C’est Nous qui répartissons ici-bas leur subsistance et qui élevons certains au-dessus des autres afin que les uns soient au service des autres. Mais la miséricorde de ton Seigneur est préférable à tout ce qu’ils peuvent amasser. » (Coran 43/32).
Il fait partie de la miséricorde divine que le serviteur se contente de ce qu’il a et en soit satisfait. Et aussi, qu’Allah lui permette de gérer ses affaires comme il convient et se dispense d’avoir à quémander à autrui. Et cela fait partie des actes salutaires, comme l’a dit le Prophète () : « Trois faits sont salutaires » et il cita entre autres : « La pondération dans l’aisance et la pauvreté. » Mais il est des gens qui ne se contentent pas de ce qu’ils ont. D’autres ne savent pas gérer ce qu’Allah leur a octroyé comme biens et en dépensent plus qu’ils n’en reçoivent. De ce fait, ils empruntent et recourent aux dettes en raison de leur mauvaise gestion. Pris dans le flot de la vie, insouciants des fâcheuses conséquences des dettes.
Le Prophète demande à Allah de le préserver des dettes
Parce que les dettes sont une lourde charge, un souci pesant. Le meilleur des hommes a lui-même demandé à Allah de l’en préserver lorsqu’il invoqua son Seigneur à travers cette invocation générale : « Ô Allah Puisses-Tu me préserver des soucis et de la tristesse, l’incapacité à agir, de la paresse, de la lâcheté, de l’avarice, du poids des dettes et de l’injustice des hommes. » (Rapporté par Boukhari)
Les textes scripturaires sont la preuve que s’endetter est dangereux. Voici le martyr qui est pardonné dès la première goutte de sang tombée. Il est à l’abri des châtiments de la tombe et de ses épreuves. Il pourra intercéder en faveur de 70 personnes de sa famille. Son âme est dans le jabot d’un oiseau vert au Paradis. Dans des lampes accrochées au trône du miséricordieux. Tous ses péchés lui sont pardonnés sauf les dettes, comme cela a été rapporté de source sûre du Prophète () qui a dit : « On pardonnera au martyr tous ses péchés, sauf les dettes. » (Rapporté par Mouslim)
Autre fait qui prouve la gravité des dettes pour toute personne qui fait preuve de négligence à ce sujet, lorsqu’un convoi funèbre passait devant le prophète () et que le défunt était endetté, il n’effectuait pas la prière funéraire sur lui jusqu’à ce qu’on eût réglé ses dettes ou qu’un fidèle encore en vie en assume la responsabilité. Et une fois qu’Allah lui permit de réaliser des conquêtes et amasser du butin et après avoir reçu de l’argent, il réglait les dettes des défunts musulmans.
Il convient de savoir qu’ajourner le règlement des dettes est un malheur pour le défunt. Jâbir (qu’Allah soit satisfait de lui) a dit : « Un homme est décédé. Nous avons procédé à sa toilette mortuaire, embaumé, mis en linceul, puis l’avons amené au Prophète () et lui avons dit : ‘’ Tu pries sur sa dépouille ?’’ Il fit quelques pas pour ce faire et demanda : ‘’A-t-il des dettes ?’’ Et d’entendre dire : ‘’Deux dinars de dette.’’ Il s’en alla. Et Abu Qatâda se chargea de régler ses dettes. Il dit : ‘’ Je me charge de régler ses deux dinars de dette.’’ Ce à quoi le Prophète (
) dit : ‘’ Cette dette t’incombe désormais puisque tu en as pris la charge et le défunt n’a plus rien à voir avec ?’’ Abu Qatâda acquiesça et le Prophète (
) pria sur la dépouille du défunt. Le lendemain, il lui demanda : ‘’Qu’as-tu fait avec les deux dinars ?’’ Et Abu Qatâda de se justifier [de ne pas les avoir encore réglés] : ‘’ Il n’est mort qu’hier.’’ Le lendemain, il revint après les avoir réglés et dit : ‘’ Je les ai réglés.’’ Et le Prophète (
) dit : ‘’ Maintenant il a échappé au châtiment dû à sa dette.’’ » (Rapporté par Abu Daoud et Nassâ’î). En effet, le défunt était jusqu’au règlement de ses dettes en prise au châtiment.
Un autre hadith met en évidence la gravité des dettes. Il a été rapporté de source sûre que le Prophète () a dit : « Gloire à Allah, qu’a-t-Il révélé de grave au sujet du règlement des dettes. Par Celui qui tient mon âme dans sa main, si un homme était tué sur le chemin d’Allah, puis ramené à la vie, puis tué à nouveau, et qu’il avait des dettes, il n’entrerait pas au Paradis avant que ses dettes ne soient réglées. » (Rapporté par Ahmad)
Bien gérer son argent est mieux que s’endetter
L’homme sage et avisé est celui qui sollicite l’aide d’Allah pour toutes ses affaires et ne recourt pas aux dettes autant que faire se peut. Allah a intimé l’ordre à ses serviteurs de prendre en compte dans leurs dépenses ce qu’Allah leur a octroyé :
« L’homme aisé versera une pension selon ses richesses et l’homme de modeste condition, selon les moyens qu’Allah a mis à sa disposition. Allah n’impose à nul homme une charge excédant les moyens qu’Il lui a accordés. Allah fera succéder l’aisance à la difficulté. » (Coran 65/7).
C’est là une injonction divine de dépenser en fonction de ses moyens, et une promesse au pauvre d’une facilité qui suivra la difficulté s’il dépense selon ses moyens. Et c’est une promesse de vérité puisque celui qui dépense selon ses moyens sans s’endetter pour concurrencer les riches alors il se dispensera d’y avoir recours. En effet, la bonne gestion de ses ressources sans recourir aux dettes feront qu’il se suffira de ce qu’il a gagné, il le dépensera pour lui et sa famille, et non pas pour régler une dette et rester ainsi dans la difficulté.
Annonce tes besoins à Allah et mets en œuvre les moyens requis
Le croyant dit à Allah ses besoins et son indigence avec la certitude qu’Allah est le riche, qu’il est généreux et que Ses grâces sont infinies. Dans le même temps, il met en œuvre les moyens requis pour acquérir de l’argent licite et pur :
« C’est Lui qui vous a facilité la vie sur terre. Parcourez donc ses contrées et nourrissez-vous des dons du Seigneur. C’est vers Lui que vous serez rassemblés. » (Coran 67/15).
Si tu es éprouvé par des dettes, empresse-toi de les régler
Si le fidèle est éprouvé par des besoins et doit s’endetter, il devrait s’efforcer de les régler au plus tôt pour se décharger de toute responsabilité et rencontrer son Seigneur exempt de toute dette. D’après Abou Horayra (qu’Allah soit satisfait de lui), le Prophète () a dit : « Si je possédais l’équivalent du mont Uhud en or, je n’aimerais pas en conserver une seule pièce d’or trois jours d’affilée, sauf de quoi rembourser une dette. » (Rapporté par Boukhari) En effet, le Prophète (
) veillait à régler ses dettes.
Lorsqu’il contracte une dette, si le fidèle a l’intention de bien agir et a la ferme résolution de la régler, alors Allah lui permettra de la régler. Mais s’il veut consommer l’argent des gens injustement et ajourner continuellement le paiement de sa dette, alors Allah le punira d’un douloureux châtiment en ce monde et dans l’au-delà. Le Prophète () a dit : « Celui qui emprunte de l’argent avec l’intention de le rendre, Allah lui permettra de le rendre. Mais celui qui a emprunté de l’argent en ayant l’intention de ne pas le rendre, Allah le fera disparaitre sans qu’il puisse en profiter. » (Rapporté par Boukhari)
Accorder un délai
D’un autre côté, nous adressons une invitation à tous ceux auxquels Allah a fait largesse, de faire aumône et de faciliter à leurs débiteurs en ayant à l’esprit que « Jamais aumône n’a diminué de richesse. » (Rapporté par Mouslim) Et si un pauvre ou un nécessiteux se présente et expose une requête, qu’il l’aide à l’obtenir. Et si les âmes de quelques personnes riches ne font pas preuve de largesse en donnant aumône, alors au moins qu’ils prêtent à ceux qui en ont besoin et patientent s’ils sont dans la difficulté de les rembourser, en raison de ce verset :
« Si le débiteur n’est pas en mesure de rembourser ses dettes, accordez-lui un délai jusqu’à ce qu’il redevienne solvable. Mais il est préférable pour vous de lui consentir une remise de dette [Totale ou partielle], si seulement vous saviez ! » (Coran 2/280).
Que nos frères riches sachent qu’en faisant preuve de patience envers leurs débiteurs en difficulté, ils obtiennent une énorme récompense comme le prouve ce hadith rapporté par Ahmad, qu’Allah lui fasse miséricorde, selon Burayda (qu’Allah soit satisfait de lui) : j’ai entendu le Prophète () dire : « Celui qui accorde un délai à un débiteur en difficulté aura chaque jour la récompense du montant emprunté en aumône. » Et il ajouta : et je l’ai entendu dire : « Celui qui accorde un délai à un débiteur en difficulté aura chaque jour la récompense de deux fois le montant emprunté en aumône. » Burayda interpela le Prophète (
) et lui dit : je t’ai entendu dire : « Celui qui accorde un délai à un débiteur en difficulté aura chaque jour la récompense du montant emprunté en aumône. » Puis je t’ai entendu dire : « Celui qui accorde un délai à un débiteur en difficulté aura chaque jour la récompense de deux fois le montant emprunté en aumône. » Ce à quoi il dit : « Il a pour chaque jour la récompense d’une aumône équivalente au montant prêté jusqu’au délai de paiement convenu. Une fois ce délai passé, s’il lui accorde encore un délai, il aura chaque jour la récompense de deux fois le montant emprunté en aumône. »
Mouslim, qu’Allah lui fasse miséricorde, rapporte que le Prophète () a dit : « Allah mettra à l’ombre de Son Trône celui qui accordait un délai à un débiteur en difficulté ou effaçait tout ou partie de ses dettes. »
Selon Qatâda (qu’Allah soit satisfait de lui), le Prophète () a dit : « Celui qui accorde un délai à son débiteur ou efface sa dette sera sous l’ombre du Trône le jour de la Résurrection. » (Rapporté par Ahmad et Tirmidhi)
Pour expliquer la raison profonde de ce hadith, Ibn Al-Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit : « Puisque le créditeur a placé son débiteur à l’ombre du délai et de la patience, et l’a sauvé de la chaleur de s’entendre réclamer son dû et la charge de devoir rembourser la dette alors qu’il est dans l’incapacité de le faire et éprouve des difficultés. En contrepartie, Allah sauvera ce créditeur de la chaleur du soleil le jour de la Résurrection en le plaçant à l’ombre du Trône. » Fin de citation.
Selon Abou Horayra (qu’Allah soit satisfait de lui), le Messager d’Allah () a dit : « Un commerçant prêtait de l’argent aux gens et quand il voyait un débiteur dans la difficulté, il disait à ses serviteurs : Soyez indulgents avec lui, peut-être qu’Allah se montrera indulgent avec nous. Et Allah se montra effectivement indulgent avec lui. » (Rapporté par Boukhari et Mouslim)
Dernière recommandation
Une recommandation que j’adresse à moi-même et aux musulmans : efforçons-nous autant que possible d’éviter de nous endetter. Je rappelle l’invocation du Prophète () dans laquelle il a dit : « Ô Allah, je cherche protection auprès de Toi contre les péchés et les dettes. » On lui dit : « Qu’est-ce que tu demandes souvent protection contre les dettes ! » Il répondit : « Quand un homme s’endette, il parle et ment, promet et faillit à sa promesse. » (Rapporté par Boukhari et Mouslim)
Il a été rapporté que Mu’âwiyya (qu’Allah soit satisfait de lui) a dit : « La servitude d’un homme libre c’est ses dettes. »
Il est suffisant pour condamner les dettes de citer l’adage populaire : s’endetter : des soucis la nuit et une honte le jour.
Un homme endetté a composé ces vers :
Si le jour pouvait laisser place à la nuit
Car le matin amène son lot de soucis
Des besoins qu’on ne peut supporter
Ou régler, c’est l’effroi de l’endetté