Al-Bayhaqî, le savant encyclopédique et le juriste

Abu Bakr Ahmad ibn Al-Husayn Al-Bayhaqî, l’imam, le savant du hadith érudit, l’auteur d’ouvrages éminents. L’homme qui a passé sa vie dans le champ du savoir et de la connaissance jusqu’à se distinguer dans les différentes disciplines des sciences islamiques et que sa réputation atteigne les contrées les plus éloignées.

Il a étudié auprès des sommités les plus remarquables de son époque. Les savants ont attesté de son rang avancé et de sa maitrise du savoir religieux. Il ne faisait pas partie de ces savants dont la mémorisation des textes les détourne de leur compréhension. Au contraire, sa capacité de mémorisation n’était que la rétribution de sa bonne compréhension de ces textes. C’était donc un savant du hadith et un juriste.

Il débuta son périple en quête du savoir à l’âge de 15 ans sans se contenter de le faire dans son pays uniquement, mais il prit la route pour plusieurs pays comme Nîsâbour, l’Irak, le Hijâz. Il apprit de nombreuses disciplines de la religion. Le nombre de ses Cheikhs s’élève à plus de cent Cheikhs. De retour de son périple qui aura duré plus de trente ans, il se retirera dans sa ville pour se consacrer à l’écriture. Ceci, après être devenu érudit dans son domaine, unique en son époque, il publia de nombreux ouvrages dont certains en plusieurs volumes et nombre d’entre eux n’avaient pas leur pareil.

Abu Bakr Al-Bayhaqi aura acquis une large palette de savoirs religieux. Il accorda une importance particulière à la science du hadith, plus particulièrement en l’apprenant auprès de Abu Abdillah Al-Hâkim Al-Nîsâbûrî dont il fut un élève. Il composa de nombreux ouvrages dans la science du hadith et, en plus de cela, se spécialisa dans le domaine des ‘Ilal Al-Hadith, c'est-à-dire la critique subtile des hadiths qui dévoile les aspects les moins évidents. Il apprit également la jurisprudence selon l’école de Shâfi’i et il fut un des savants qui prit le plus parti pour cette école et s’y distinguera. Il apprit également la science des fondamentaux de la compréhension des textes scripturaires, la scolastique, ce qui lui permit d’avoir un regard avisé sur les hadiths et de concilier entre les hadiths qui présentent d’apparentes contradictions. En tant que savant encyclopédique et maitre de son art, il était unique à son époque au point où il fut attesté qu’il avait atteint le rang de l’Ijtihâd. Son savoir et ses œuvres étaient bénis. Les gens affluaient de toutes les contrées du monde islamique pour venir profiter de ses ouvrages.

Son nom et son lignage :

Abu Bakr Ahmad ibn Al-Husayn ibn Ali ibn Moussa Al-Bayhaqî Al-Khasrujardî.

Le nom Bayhaq est d’origine perse, il signifie le meilleur. C’est une région aux nombreuses localités aux environs de Nîsâbûr, dans le Khorâsân de l’Ouest. Région d’où sont sortis d’innombrables savants. La ville de Bayhaq correspond de nos jours à la ville de Sabzevar en Iran, Province du Khorassan Razavi, au nord-est de l’Iran, à 250 km à l’ouest de la ville de Mashhad, capitale de ladite province.

Khasrujard est une petite localité de la ville de Bayhaq.

Son périple en quête du savoir :

L’imam Al-Bayhaqi est né en l’an 384 de l’Hégire, au mois de Sha’bân. À 15 ans, il se mit à voyager à la rencontre des Cheikhs pour apprendre le savoir religieux à sa source. Il commença donc par apprendre auprès des Cheikhs de sa ville, Khasrujard.

Le premier endroit où il se rendit à l’extérieur de sa ville est Nîsâbûr et les villes avoisinantes.

Les endroits les plus importants où il fit halte sont l’Irak et le Hijâz où il se rendit notamment pour accomplir le Hajj. Mais aussi : Nûqân, Isfrâyîn, Tûs, Al-Mahrajân, Asad Âbâd, Al-Dâmighân, Asbahân, Al-Ray, Al-Tâbirân, Nîsâbûr, Rûdhbâr, Bagdad, la Mecque et Médine, Chatt-el-Arab, et bien d’autres villes.

Il apprit nombre de hadiths à Bagdad qui était alors l’un des centres les plus importants où se retrouvaient les savants du hadith les plus éminents de cette époque. Al-Bayhaqî poursuivit son périple en quête du savoir dans les différentes contrées islamiques dans le but d’apprendre davantage de hadiths auprès des Cheikhs qui les rapportent avec les chaines de narrateurs les plus courtes qui soient.

Après un voyage continu de plus de trente ans, notre imam prit le chemin du retour dans sa ville de Bayhaq après avoir acquis un rang élevé et devenu un célèbre savant. Il se retirera avec les trésors de savoir acquis durant son périple pour en sortir avec des livres dont peu trouveront leur semblable dans leur domaine. Les fruits de ses efforts et la force de sa détermination dans l’étude de la religion lui permettront de réunir un large savoir et de produire des ouvrages que les savants ont comblés d’éloges.

Ses Cheikhs :

Al-Bayhaqî a appris auprès d’un ensemble de savants dont les plus célèbres sont Al-Hâkim Al-Nîsâbûrî, l’auteur du Mustadrak ‘Ala Al-Sahihayn, Ibn Fawrak Al-Asbahânî, Abu Abd Al-Rahman Al-Sulamî, Abu Mansûr Al-Baghdadî, Abu Mohammed Al-Juwaynî, le père du savant surnommé Imâm Al-Haramayn.

Son ascétisme et son scrupule :

Al-Bayhaqî était un de ces savants qui joignent au savoir religieux, sa mise en pratique, ceux qui prennent le Prophète () comme modèle, cheminent sur sa voie et celle de ses compagnons. Il était ascète et scrupuleux, se contentant de peu de chose de ce monde, se suffisant du minimum, chaste, plein de dévotion, ressentant avec force qu’Allah l’observe dans tous ses actes et paroles.

Abd Al-Ghâfir Al-Fârisî a dit: “ Al-Bayhaqî était de ces savants qui se suffisaient de peu de ce bas monde, s’embellissaient par l’ascétisme et le scrupule. »

Al-Dhahabî a dit : « Il a jeûné pendant trente ans. »

Ibn Khallikân a dit : « C’était un ascète, se limitant à peu de choses de ce bas monde, plein de dévotion et de scrupule, selon la voie des Salafs. »

Ibn Al-Athîr a dit : « Il était chaste et ascète. »

Al-Qârî a dit : « Il était au comble de la pondération au cours des discussions religieuses et des recherches théologiques. »

Yâqût Al-Hamawî a dit dans son Mu’jam Al-Buldân : « Unique à son époque pour ce qui est de la mémorisation et de l’excellence avec une religiosité irréprochable. »

Al-Dhahabî a dit dans Al-‘Ibar : « Il a été utile aux musulmans avec ses ouvrages tant à l’est qu’à l’ouest en tant qu’imam, religieux, par ses mérites, la maitrise de son art, qu’Allah lui fasse miséricorde. »

Al-Subkî a dit dans Al-Tabqât : « L’imam Al-Bayhaqî était un des imams des musulmans, un croyant sur la bonne voie, un prédicateur de la religion, ascète et scrupuleux, plein de dévotion. »

Ibn Kathir a dit dans Al-Bidâya : « Il était ascète, se contentant de peu de chose de ce monde. Très dévot, scrupuleux, qu’Allah lui fasse miséricorde. »

Al-Bayhaqî et la science du hadith :

La science du hadith est l’aspect sur lequel Al-Bayhaqi s’est le plus distingué. Il a consacré ses efforts à cette noble science, faisant la synthèse de nombre de questions avec minutie, il composa des ouvrages en des volumes énormes qui attestent de son vaste savoir.

De tous les savants du hadith, Al-Bayhaqi occupe un rang inégalé. Pour preuve, il est un des rares à qui on affilie le titre de Al-Hâfidh.

Compiler les hadiths n’était pas le seul objectif de Al-Bayhaqi, à côté de cela, il effectua la critique des narrateurs de sorte à exclure tout ce qui ne convenait pas d’être attribué au hadith. Il a distingué les hadiths authentiques des faibles, et veillait constamment à ce que ses ouvrages ne comportent que des récits authentiques, bien qu’ils contiennent d’autres récits de degrés divers. Mais il fallait expliquer avec force et détails le degré de chaque récit, de sorte à distinguer l’authentique (Sahîh) du bon (Hasan) et même du faible (Dhaîf), en toute clarté.

Les ouvrages de Al-Bayhqai ont émerveillé les savants et obtenu leur respect tant à son époque que plus tard. Al-Nawawi a dit : « Les savants du hadith sont unanimes pour affirmer qu’Al-Bayhaqi est plus minutieux que son Cheikh Al-Hâkim, l’auteur du Mustadrak, pour ce qui est des critères de validation du hadith. »

Comme cela est mentionné dans le Majmû’ Al-Fatâwa, Cheikh Al-Islam ibn Taymiyya a dit : « Al-Bayhaqi est le plus savant de la science du hadith de tous ceux de l’école Shâfi’ite. » Fin de citation.

Le professeur Ahmad Saqr l’a surnommé : ‘’ l’organisateur de la sunna ‘’ en raison de ses efforts de classification pour mettre la sunna à la portée des étudiants.

Al-Bayhaqi et Al-Shâfi’i :

Al-Bayhaqi ne désirait pas moins apprendre la jurisprudence et connaitre les méthodes de déduction des statuts juridiques des textes que son désir de maitriser la science du hadith.

C’est pour cette raison qu’il a dès le début de ses études accordé une importance particulière à cette discipline en l’apprenant des Cheikhs les plus compétents de son époque, et ce, jusqu’à atteindre le rang de l’Ijtihad et de la Fatwa. Al-Dhahabi a dit : « Si Al-Bayhaqi avait souhaité poser les bases d’une école de jurisprudence propre à lui, il aurait pu le faire en raison de son large savoir et de sa connaissance des divergences opposants les juristes. Mais il a préféré restait dans le cadre des écoles connues à son époque et il choisit d’adhérer à celle de Shâfi’i parce que, après les avoir comparées, il a considéré que c’était l’école la plus proche de la sunna et du hadith. Elle l’était plus que toutes les autres écoles de jurisprudence.

Ce choix ne se porta sur cette école qu’après avoir fait une étude et une recherche sur la question, après comparaison et synthèse des faits, après examen minutieux et après avoir acquis la conviction que c’était le choix le plus pertinent. Mais avec ceci, il ne fit pas preuve d’esprit partisan en soutenant tous les avis de son école qu’elle ait raison ou pas. Au contraire, il prenait la défense des avis de chaque école et de ses savants qui posaient les bases de leur méthodologie en fonction de leur connaissance du Coran et de la Sunna. Il avait pour objectif d’atteindre la vérité en faisant ses efforts de réflexion pour déduire des textes le statut juridique d’un fait nouveau. Et, si Allah le veut, il est récompensé par Allah, même s’il a commis une erreur.

Après avoir opté pour l’école de Shâfi’i, il se mit à défendre cet imam et œuvrer en vue de compiler ses textes, expliquer ses propos, exposer ses avis, appuyer son école. Il passa sa vie au service de cette école au point où l’imam Al-Juwayni, imâm Al-Haramayn, subjugué par l’importance excessive qu’Al-Bayhaqi accordait aux avis juridiques de shâfi’i en composant son livre Al-Mabsût, dans lequel il recensa tous les textes de Shâfi’i dans la jurisprudence, dira : « Tous les savants de l’école Shafi’ite sont redevables à l’imam Shâfi’i, sauf Al-Bayhaqi, c’est Shâfi’i qui lui est redevable, en raison des ouvrages qu’il a composés pour donner la part belle à sa personne, son école et à ses avis juridiques. »

Il accordait tant d’importance à la jurisprudence de Shâfi’i qu’il composa même des ouvrages pour traiter d’une seule question, à l’image du livre relatif à la lecture derrière l’imam, Al-Qirâ’at Khalf Al-Imam, Mas’alat Al-Khâtim, et parmi ses ouvrages utiles : Al-Mabsût Fî Nussûs Al-Shâfi’i, et Ma’rifat Al-Sunan Wa Al-Athâr, Al-Khilâfiât Bayna Abi Hanifa Wa Al-Shâfi’i. Et aussi, Ahkâm Al-Qurân, Bayân Khata’ Man Akhat’a ‘Ala Al-Shâfi’i, Radd Al-Intiqâd ‘Ala Abi Abdillah Al-Shâfi’i. Et il a bien d’autres ouvrages.

Ses ouvrages :

La production scientifique d’Al-Bayhaqi est importante. Il a largement contribué à enrichir la bibliothèque islamique dans le domaine du hadith dont il s’est occupé avec une attention particulière comme l’ont fait les autres savants du hadith. Ses ouvrages étaient célèbres de son vivant et ont reçu les éloges des savants et des Cheikhs.

Allah l’a comblé en lui donnant la capacité d’écrire et de composer des ouvrages de qualité, de bien les ordonner, ses ouvrages ont donc été couronnés de succès, il les a écrits avec une intention pure, sincèrement pour Allah.

Al-Dhahabi a dit : « Les ouvrages d’Al-Bayhaqi sont d’une grande valeur, plein d’enseignements, peu sont ceux qui en ont composé d’aussi bons. Les savants devraient donc bien les lire, surtout le Sunan Al-Kabîr. »

Ses ouvrages avaient une marque distinctive qui les particularisait : ils étaient très bien ordonnés, de façon très précise, presque aucun autre ouvrage ne l’était de la sorte. C’est pour cela qu’on les a décrits comme des ouvrages n’ayant pas leur pareil.

Ses ouvrages sont nombreux, plus de 25. Nous citerons les suivants :

1- Al-Sunan Al-Kubra, imprimé en 11 volumes avec les annotations de Ibn Al-Turkmânî intitulé Al-Jawâhir Al-Naqî qui est imprimé en annexe.

2- Ma’rifat Al-Sunan Wa Al-Athâr, imprimé en 15 volumes.

3- Al-Jâmi’ Li Shu’ab Al-Imân, imprimé en 14 volumes.

4- Dalâ’il Al-Nubuwwa, imprimé en 7 volumes.

5- Al-Khilâfiât Bayna Abi Hanifa Wa Al-Shâfi’I imprimé en 8 volumes.

6- Manâqib Al-Imam Al-Shâfi’i en deux parties avec une recension de Al-Sayyid Ahmad Saqr.

7- Al-Asmâ Wa Al-Sifât.

8- Bayân Khata’ Man Akhat’a ‘Ala Al-Shâfi’i.

9- Hayât Al-Anbiya Fî Qubûrihim.

10- Al-Da’awât Al-Kabir.

11- Radd Al-Intiqâd ‘Ala Alfâdh Al-Shâfi’i.

12- Al-Zuhd Al-Kabîr.

13- Al-Sunan Al-Saghîr.

14- Fadâ’il Al-Awqât.

15- Al-Qirâ’at Khalf Al-Imam.

16- Al-Qadâ Wa Al-Qadar.

17- Al-I’tiqâd.

18- Al-Madkhal Ila Al-Sunan Al-Kabîr.

Son décès :

Après cette vie pleine de savoir, d’écrits, d’enseignement du hadith et de la religion, l’imam Al-Bayhaqi a quitté ce monde le 10 du mois de Jumâda Al-Ûlâ de l’an 458 de l’hégire de la ville de Nîsâbûr, ville dans laquelle il donnait ses cours. Sa dépouille fut transportée et enterrée à Bayhaq.

Sa mort – qu’Allah lui fasse miséricorde – eut lieu à un âge avancé de 74 ans passés à apprendre et à enseigner. Qu’Allah lui fasse miséricorde et qu’Il le récompense par un bien pour ce qu’il a fait en faveur de l’islam et des musulmans.