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L’histoire des musulmans d’al-Andalus II

L’histoire des musulmans d’al-Andalus II

Nous continuons dans ce présent article notre présentation d'une histoire succincte des musulmans d'al-Andalus.

IV – La troisième période de l’Etat omeyyade (300 – 368 H)

Cette période se distingue par le fait que c’est durant celle-ci que le pouvoir musulman andalous proclama le califat omeyyade d’al-Andalus. Deux hommes seulement se succédèrent à la tête de l’Etat durant cette période : ‘Abd al-Rahmân III surnommé al-Nâsir et son fils al-Hakam II surnommé al-Mustansir ; durant leurs règnes al-Andalus redevint un Etat fort et florissant, et ce, après qu’il eut connu de graves difficultés dues aux incessantes guerres intestines et aux insurrections, de même que l’Etat islamique se réunifia, car il avait été déchiré et démembré à cause de l’appétit vorace de certaines principautés arabes et berbères. Chose importante, c’est durant son règne que ‘Abd al-Rahmân III proclama le califat d’al-Andalus, il est important de signaler qu’avant cette proclamation les dirigeants d’al-Andalus étaient appelés « princes » et ils évitaient soigneusement de se faire appeler « califes » pour des raisons légales. ‘Abd al-Rahmân franchit le Rubicon estimant qu’il méritait largement ce statut, les principales raisons en étaient que sous son règne al-Andalus fit d’immenses progrès dans diverses domaines : essor culturel extraordinaire, expansion de l’urbanisation, diffusion à grande échelle de la science ou encore un renforcement du pouvoir tant à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur. Ce furent donc là les principales caractéristiques de cette période rayonnante.

V – La période du chambellan al-Mansûr (368 – 399 H)

C’est sans conteste sous le règne d’al-Mansûr qu’al-Andalus fut au fait de son essor et de son épanouissement ; par ailleurs, on appelle cette période « la période de la domination des princes », c’est durant cette dernière que le chambellan (hâdjib) al-Mansûr ibn abî ‘Âmir devint le véritable chef de l’Etat alors que le calife officiel Hichâm al-Mu`ayyid n’était en réalité qu’un homme de paille. Ce dernier devint calife à la mort de son père, al-Hakam II, il n’avait alors que dix ans. Ainsi, al-Mansûr fut incontestablement le plus puissant et le plus grand dirigeant de toute l’histoire d’al-Andalous, personne ne le concurrença, pas même ‘Abd al-Rahmân Ier. Le règne d’al-Mansûr a pour principale caractéristique le fait que le djihad dans le sentier d’Allah, exalté soit-Il, fut mené avec une grande constance, c’est ainsi qu’al-Mansûr organisa plus de cinquante expéditions militaires contre les régions septentrionales de la Péninsule où vivaient les ennemis chrétiens de l’Etat islamique, il faut noter que lors de ces expéditions les musulmans ne furent jamais défaits ; lors de ces dernières, les troupes d’al-Mansûr prirent notamment la ville de Barcelone, de plus ces expéditions permirent à al-Mansûr de dominer la totalité d’al-Andalus pour la première fois depuis la conquête. Al-Mansûr échappa à de nombreux complots et attentats visant sa personne, puis il mourut en 392 de l’Hégire, c’est son fils ‘Abd al-Malik qui lui succéda, ce dernier poursuivit l’œuvre politico-militaire de son père jusqu’en 399 de l’Hégire, puis après cette date, al-Andalus entra dans un long et sombre tunnel.

VI – La période de l’anarchie et de la chute du califat omeyyade d’al-Andalus (399 – 422 H)

Durant cette funeste période se succédèrent à la tête d’al-Andalus de nombreux califes plus faibles et falots les uns que les autres, c’est bien simple, ils furent plus nombreux que tous les dirigeants réunis que connut al-Andalus dans les trois premiers siècles de la présence musulmane en Espagne, cette période vit l’anéantissement du prestige de l’Etat omeyyade d’al-Andalus. Nous constatons que durant cette période, certains chefs musulmans commencèrent à demander de l’aide à des chrétiens du nord dans leurs luttes intestines pour le pouvoir. Ainsi, le problème posé par les Berbères s’accentua, ces derniers gagnèrent un peu plus en indépendance par rapport au pouvoir central et prirent la tête de nombreuses principautés, notamment dans le sud du pays, ils fondèrent même un Etat puissant qui est connu sous le nom d’« Etat des Banî Hamûd ».
La caractéristique la plus évidente de cette période fut sans conteste le retour en force du chauvinisme tribal détestable entre les Arabes et les Berbères. Signalons que durant cette période des acteurs nouveaux vont jouer un rôle prépondérant sur le cours des événements, il s’agit des Saqâliba, c’est-à-dire des mercenaires et esclaves d’origine slave, ces derniers devinrent pus nombreux sous le règne d’al-Mansûr qui les a beaucoup utilisés pour faire contrepoids aux Arabes et aux Berbères ; ces Saqâliba devinrent les maîtres d’îles se trouvant à l’est d’al-Andalus.

VII – La période des Taïfas ou les « Royaumes des factions » (422 – 483 H)

Cette période des Taïfas est l’un des âges les plus sombres de l’histoire d’al-Andalus ; en effet, durant celle-ci, l’Etat islamique d’al-Andalus fut morcelé en une multitude de micro-Etats dont la plupart étaient extrêmement faibles, ces derniers étaient contrôlés par des chefs tribaux assoiffés de pouvoir et imprégnés d’un esprit clanique très fort. Ces micro-Etats furent un moment au nombre de 22, les Berbères contrôlaient le sud, les Saqâliba l’est et le reste du territoire fut partagé entre des petits potentats locaux avides de biens et de pouvoir et des anciennes familles.

Les principales caractéristiques de la sombre période des Taïfas :
1 – La diffusion endémique de la corruption et de la décadence morale chez les rois des Taïfas, ce qui eut malheureusement une influence néfaste sur leurs sujets qui prirent le même chemin, ces derniers vécurent à l’instar de leurs maîtres dans le luxe et l’opulence, ce qui eut pour conséquence de transformer les musulmans en des individus faibles et lâches, lesquels négligeaient désormais le danger que constituaient les chrétiens du nord.
2 – L’éclatement incessant de guerres intestines destructrices entre les rois des Taïfas, lesquels voulaient par ces conflits étendre leur domination politique et territoriale aux dépens de leurs voisins, c’est ainsi que les musulmans se perdirent dans des guerres aussi futiles qu’interminables déchirant alors la totalité d’al-Andalus. Chaque roitelet s’alliait avec des chrétiens du nord pour combattre son voisin musulman, ces alliances ignobles avec les mécréants est sans aucun doute la pire caractéristique de cette sombre période ; cela eut pour conséquence la disparition du dogme d’al-Walâ` wa-l-Barâ` chez les musulmans de cette période, sauf pour celui dont Allah, exalté soit-Il, a eu pitié.
3 – Le développement des forces des chrétiens du nord et leur unification sous le commandement d’Alphonse VI, qui était connu pour être un homme très dur, ce dernier fut l’artisan d’une grande victoire qui atteint durement le moral des musulmans d’al-Andalus ; en effet, Alphonse VI s’empara en 476 de l’Hégire de la ville de Talitla, laquelle avait été l’ancienne capitale de l’Espagne, sa prise par les chrétiens initia une entreprise guerrière de reconquête, connue sous le nom de Reconquista, qui aboutit finalement après maintes événements à la chute d’al-Andalus.
4 – Le développement d’un sentiment « nationaliste » chez les gens d’al-Andalus et leur volonté de fonder un système politique indépendant qui leur est propre loin de tout rapport avec le monde musulman.

VIII – La période des Almoravides, en arabe al-Murâbitûn (484 – 539 H)

Durant cette période l’Etat islamique d’al-Andalus récupéra un peu de sa puissance passée, et ce, après que les roitelets des Taïfas eurent appelé à l’aide les Almoravides qui contrôlaient l’Afrique du Nord jusqu’au cœur du Sahara, leur grand chef n’était autre que Yûsuf ibn Tâchfîn. Celui-ci répondit à l’appel au-secours des musulmans d’al-Andalus, il traversa donc la mer avec son armée et défit les chrétiens d’Espagne à al-Zallâqa en 479 de l’Hégire, il les repoussa et écarta donc le danger qu’ils représentaient, puis il retourna au Maghreb.
Mais à peine Yûsuf ibn Tâchfîn fut rentré chez lui que les gens d’al-Andalus lui demandèrent de l’aide pour anéantir la domination des roitelets des Taïfas, les oulémas et les jurisconsultes confirmèrent à Yûsuf que ce soutien militaire était une obligation religieuse, et c’est ainsi que Yûsuf ibn Tâchfîn retraversa la mer avec son armée et vainquit les roitelets des Taïfas en 484 de l’Hégire.
Les Almoravides étaient connus pour mener une vie extrêmement rude et spartiate, en fait leurs origines étaient bédouines et donc ils vivaient comme les nomades du Sahara, cela gêna grandement les élites et notables d’al-Andalus qui, eux, étaient habitués à une vie de luxe et les amena à se reprocher les uns les autres d’avoir fait venir les Almoravides.
Toutefois, le règne des Almoravides fut écourté à cause de la révolte que menèrent contre eux les adeptes d’un individu qui prétendait être le Mahdi, un certain Ibn Tûmart, ces derniers sont connus sous le nom des Almohades (en arabe al-Muwahhidûn). Les Almohades déclenchèrent une guerre sans merci contre les Almoravides à partir de 515 de l’Hégire, et ce, jusqu’à ce que les premiers vainquirent les seconds en 539 de l’Hégire.

IX – La période des Almohades (539 – 630 H)

Les Almohades sont les adeptes d’un individu qui a prétendu être le Mahdi, son nom est Muhammad ibn Tûmart, ces derniers ont combattu les Almoravides durant plus de 25 ans jusqu’à faire chuter leur Etat en 539, ils récupérèrent donc le très vaste royaume almoravide qui comprenait le Maghreb et al-Andalus. Une fois au pouvoir, les Almohades ont commencé à imposer aux gens à adhérer à leur dogme, lequel est un mélange entre le dogme des Moutazilites et celui des Acharites ; cependant, ils suivirent le même chemin que les Almoravides dans leur combat contre les royaumes d’Espagne, ils défirent ces derniers de nombreuses fois, mais la plus grande victoire almohade contre les royaumes eut lieu en 591 de l’Hégire lors de la batille d’al-Arak, cette dernière peut être comparer à d’autres grandes victoires comme celles d’al-Zalâqa, de Aqlîch ou encore d’Ifrâgha.
Toutefois, les chrétiens du nord se remobilisèrent et purent concrétiser une victoire décisive contre les Almohades en 609 de l’Hégire lors de la bataille d’al-‘Iqâb, cette dernière menaça même gravement la puissance des Almohade et finalement accéléra la chute de leur Etat. Il est à noter par ailleurs que les incessantes révoltes et insurrections des gens d’al-Andalus contre le pouvoir almohade est l’une des caractéristiques marquantes de cette période, de même que la déviance du dogme des tenants de cet Etat fut l’une des autres causes principales de sa chute.

X – La période des rois des Banî al-Ahmar à Grenade (630 – 897 H)

Cette période commença après la chute de l’Etat des Almohades qui contrôlait le Maghreb et al-Andalus. Cette chute inaugura la fin de la domination de l’Etat islamique sur al-Andalus, car en effet toutes les principautés de la Péninsule devinrent indépendantes les unes des autres, ce qui facilita grandement la reprise par les chrétiens d’Espagne de la plupart des grandes villes d’al-Andalus, c’est ainsi que tombèrent entre les mains chrétiennes des villes comme Valence, Cordoue, Murcie ou Séville dans un laps de temps très court. Cette reconquête fulgurante effectuée par les chrétiens contraignit les musulmans de ces territoires repris à se réfugier dans le royaume de Grenade dans le sud d’al-Andalus ; ce royaume fut fondé par Muhammad ibn Yûsuf al-Nasrî, surnommé Ibn al-Ahmar, ses descendants le dirigèrent jusqu’à sa chute en 897 de l’Hégire, c’est-à-dire en 1492 de l’ère chrétienne.
Ce qui est très étonnant c’est que Grenade fut la dernière et la seule à tenir tête aux ennemis chrétiens, cela peut s’expliquer par le fait que s’y réfugièrent la crème des musulmans d’al-Andalus, c’est-à-dire ceux dont l’humiliation de l’exil forcé avait nourri une haine inextinguible contre les chrétiens, ils étaient paysans, commerçants ou artisans et contribuèrent grandement à renforcer le royaume de Grenade. Par ailleurs, un autre élément contribua à maintenir le pouvoir de Grenade durant une longue période, il s’agit de l’aide apportée par des princes maghrébins, les Mérinides ; ces derniers envoyèrent à Grenade des combattants et des armes afin que ses habitants puissent relever le défi militaire lancé par les chrétiens espagnols, c’est ainsi que grâce à cette aide providentielle Grenade put atteindre le faite de sa puissance à l’époque de Muhammad V des Banî al-Ahmar (763 H).
Hélas, la décadence des mœurs et les conflits internes commencèrent à se répandre dans le royaume de Grenade, et concomitamment le royaume d’Espagne s’unifiait sous l’égide du roi Ferdinand et de la reine Isabelle, leur but politique principal était clair : débarrasser définitivement l’Espagne de toute présence musulmane, il leur fallait donc impérativement s’emparer de Grenade. Au moment où l’Espagne devenait très puissante, les luttes intestines entre les princes des Banî al-Ahmar atteignirent leur paroxysme, et notamment le conflit qui opposa les partisans de ‘Alî Abû al-Hasan et ceux de son fils Abû ‘Abdallah.
A partir de l’année 895 de l’Hégire les chrétiens déclenchèrent une guerre totale et sans merci contre le royaume de Grenade, cette terrible offensive aboutit à la chute de Grenade, la reddition fut signée le 21 de muharram en l’an 897 de l’Hégire. Cette chute inaugura l’une des périodes les plus sombres et les plus horribles de l’histoire de l’Europe, des centaines de milliers de musulmans furent assassinés et persécutés par les hommes de l’Inquisition, ceux qui ne moururent pas furent contraints de se convertir au catholicisme ou de s’exiler. C’est donc ce funeste événement qui mit un point final à la très longue histoire de l’Etat islamique d’al-Andalus.
Nous, musulmans d’aujourd’hui, devons nous rappeler cette histoire et l’apprendre afin d’en tirer des leçons et éviter les erreurs commises par nos ancêtres, tant religieusement que politiquement, il y a incontestablement dans l’analyse profonde de notre passé des clefs afin que nous relevions notre nation et lui redonnions la force qu’elle avait jadis. Si nos lointains aïeux d’al-Andalus ont pu durant de longues périodes être un modèle civilisationnel éclairé et puissant, nous pouvons nous aussi le devenir. Qu’Allah nous soutienne dans ce projet et fasse que nous réussissions, amin !

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