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Les actes de bienfaisance au temps des Compagnons

Les actes de bienfaisance au temps des Compagnons

Par Dr. Yusuf al-Qaradawi

Généralement rien ne manque. Ni les idées géniales ni les bonnes initiatives, et encore moins les règles les mieux appropriées pour répandre le bien. Malheureusement ces idées, ces initiatives et ces règles ne sont pas toujours mises en pratique dans la vie de tous les jours. En réalité, différents obstacles à caractère personnel se dressent sur leur chemin et empêchent leur mise en œuvre.

C’est pourquoi l’imam al-Ghazalî, dans sa lettre à son fils intitulée « Cher enfant», a écrit : « Le conseil est certes facile, mais ce qui l’est beaucoup moins c’est son acceptation ! ».
 

L’Islam a en effet horreur de ceux qui connaissent, mais qui ne pratiquent pas ce qu’ils connaissent, ceux qui recommandent aux autres des actes de bonté et qui ne les font pas eux-mêmes. D’ailleurs les oulémas considèrent que le fruit du savoir est sa pratique et qu’un savoir sans pratique équivaut à un arbre sans fruits.
Parmi ses bienfaits en faveur de la Oumma, Allah, exalté soit-Il, a implanté en elle des germes favorables à la réalisation d’actes de bienfaisance et y a établi leur fondement, fait clairement distinguer leurs caractéristiques. En conséquence, la volonté de cette Oumma de faire le bien s’est partout concrétisée par des œuvres de bienfaisance aux sources de financement bien définies : elle n’est donc pas restée au niveau des vœux pieux ou de bons testaments à préserver, mais non à exécuter. Au contraire, elle n’a cessé d’être mise en pratique depuis le temps du Prophète () et les périodes qui l’ont suivi.
Ainsi donc dans les lignes suivantes nous allons relater des modèles pratiques de ce que l’histoire a retenu parmi les actes de bienfaisance à l'époque des Compagnons du Prophète () pour que cela constitue une école qui permettra aux futurs musulmans d’apprendre et de s’inspirer de ce qu’ont fait leurs premiers ancêtres, et aux non-musulmans de connaitre les services de bienfaisances que les musulmans ont rendus, les actes de bonté qu’ils ont faits et les positions humaines qu’ils ont prises et qui prouvent que l'homme est véritablement capable d’assurer la vice gérance d’Allah sur la terre.

Le modèle des Mères des croyants (s)


-  Le modèle de Aicha ()
Umm Durra – qui était une servante employée chez Aicha – rapporte que son neveu Abdullah ibn Zubayr (qu’Allah soit satisfait d’eux), a envoyé à sa tante la mère des croyants (qu’Allah soit satisfait d’elle), dans deux sacs, une somme d’argent de cent quatre-vingts mille dirhams. Chaque sacs contenait quatre-vingt-dix mille. Elle demanda alors qu’on lui donne un plat. Or ce jour-là elle observait le jeûne. Elle s’est mise quand même à le partager entre les gens de sorte que, dans la soirée, rien ne lui en est resté. Elle demanda à sa domestique de lui servir son repas. Celle-ci lui apporta du pain et de l'huile en lui disant : « n’as-tu pas pu nous garder un peu d’argent de ce que tu as donné aujourd'hui pour que nous puissions acheter un morceau de viande pour notre repas »? Elle répondit : « Si tu me l’avais rappelé je l’aurais fait ».

Le narrateur raconte : Hichâm ibn Urwa rapporte, d’après son père, que Mu'âwiyya a, une fois, envoyé à Aicha une somme de cent mille. Et le narrateur de poursuivre : « Je jure par Allah que le soleil ne s'est pas couché ce jour-là avant qu’elle n’ait distribué la totalité de la somme d’argent ».

Tamîm a rapporté d’après Urwa ibn al-Zubayr : « Une fois j'ai vu Aicha distribuer en charité une somme de soixante-dix mille, alors qu’elle rapiéçait une partie de son bouclier et qu’elle portait un vêtement rapiécé.

‘Ata raconte : Mu'âwiyya a envoyé à Aicha un bracelet d'or avec des perles évaluées à cent mille. Elle le fit partager entre les épouses du Prophète ().

Mâlik a rapporté dans son Muwatta’ qu'il a entendu que Aicha (qu'Allah soit satisfait d’elle), l’épouse du Prophète (), a reçu un jour, alors qu’elle observait le jeûne, la visite d’un pauvre qui lui demanda de l’aide alors que dans sa maison il n’y avait qu’un pain. Elle ordonna à son employée de le servir au pauvre. Celle-ci lui répondit : « C’est tout ce que tu as comme repas pour rompre ton jeûne ». Et Aicha d’insister : « Donne-le lui tout de même ». L’employée raconte : « J'ai fait ce qu’elle m’a dit et le soir on reçut de la part d’une famille ou d’une une personne un mouton bien garni. Aicha, la mère des croyants me dit alors : « Mange de ceci, n’est-ce pas mieux que tes sollicitations (le pain que tu as voulu garder) ! ».

Mâlik raconte qu’il a entendu dire qu’un pauvre était venu voir Aicha, l’épouse du Prophète (), à la recherche d’un repas et qu’elle avait du raisin entre les mains. Elle dit à quelqu’un : Prends-en un et donne le lui ». L’homme, tout étonné, la fixa du regard. Aicha lui dit : « Cela t’étonne ? » Combien ce grain de raisin contient-il d’atomes ! [Elle faisait référence au verset : « Celui qui aura fait ne fût-ce que le poids d’un atome en bien le verra ; » (Coran 99/7)].

 

- Le modèle de Suda bint Zuma’ ()
Ibn Sa'd rapporte, de bonnes sources, d’après Muhammad ibn Sirîn: que ‘Umar a envoyé à Suda un sac plein d’argent : « Qu’est-ce que c’est ? Demanda-t-elle. « C’est », lui répondit-on, « de l’argent ». « Dans un sac comme des dattes ! » s’interrogea-elle. Elle a alors tout distribué. Apparemment elle a considéré (qu’Allah soit satisfait d’elle) comme étrange que l’argent soit rangé dans un sac comme des dattes.

 

- Le modèle Zaynab bint Jahch ()
Ibn Sa'd rapporte que Burra bint Rafî' a dit : « Lorsque les donations ont été prêtes, 'Umar envoya à Zaynab bint Jahch (qu’Allah soit satisfait d’elle) sa propre part. A l’arrivé des porteurs de la donation, elle dit : « Puisse Allah pardonner à 'Umar, mes autres sœurs ont été plus à même de distribuer ceci ». Les porteurs lui dirent : « Tout cela est pour toi ». Elle dit : « Gloire à Allah ». Elle se couvrit d’une robe pour ne pas le voir et leur ordonna de le déposer et de mettre dessus un habit. Puis elle me dit : « Fais entrer ta main, prends une partie et emmène là à la famille de tel et de tel » qui sont soit des parents à elle soit des orphelins. Elle distribua le tout en ne laissant qu’une petite partie sous le vêtement. Burra lui dit : « Puisse Allah te pardonner, ô mère des croyants, nous en avons nous aussi droit, n’est-ce pas ? Elle dit : « Prenez ce qui est sous le vêtement ». Elle raconte qu’ils ont trouvé sous le vêtement quatre-vingt-cinq dirhams, puis elle leva les mains vers le ciel, et dit : « Seigneur fais que je ne survive pas, après cette année, pour ne pas devoir recevoir les prochaines donations ». Elle décéda.

Ibn Sa'd rapporte également d’après Muhammad ibn Ka'b que la donation de Zaynab bint Jahch (qu’Allah soit satisfait d’elle) s’élevait à douze mille mais elle n’en a pris que pour une seule année. Elle disait : « Seigneur fais que je ne survive pas après cette année pour ne pas devoir recevoir les prochaines donations. Elles ne sont qu’une tentation ». Puis elle partagea le montant entre parents et nécessiteux. Ayant appris son souhait, 'Umar dit : « C’est une femme destinée au bien ». Il se rendit chez elle, la salua et lui dit : « J'ai entendu que tu as tout partagé ». Il lui envoya mille dirhams à réserver à ses propres dépenses quotidiennes à la maison. Elle en fit la même chose.

A suivre …
 

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