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Règles concernant la détérioration des marchandises pendant le transport et leur indemnisation

Question

Je travaille dans le commerce électronique. Un client d’une autre ville m’a commandé des pantalons, mais la taille qu’il avait demandée ne lui convenait pas. Je lui ai donc envoyé la bonne taille. La société de livraison était censée récupérer le premier produit (celui de la taille incorrecte) et me le retourner. Cependant, le produit retourné a été endommagé pendant le transport (les pantalons de la mauvaise taille). Ai-je le droit de réclamer une indemnisation ? Et si la réponse est oui, puis-je réclamer uniquement le coût de revient, ou le prix total du produit incluant le profit ?
Je tiens à ne consommer que de l’argent licite, et je demande à Allah de m’éloigner de l’argent illicite ou douteux.
Pour résumer : le client a demandé un échange, je lui ai envoyé le nouveau produit avec la bonne taille, qu’il a bien reçu. Mais l’ancien produit, qui devait m’être retourné, a été perdu pendant le transport. Quelle est la règle juridique dans ce cas?

Réponse

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction d'Allah soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :

Lorsqu'une société de livraison prend en charge le transport d’une marchandise, elle est assimilée à un « employé partagé » (ajîr mushtarak), c’est-à-dire une entité rémunérée pour fournir un service à plusieurs clients. En droit musulman, la responsabilité de ce type d’employé en cas de perte ou de détérioration est sujette à divergence. Toutefois, dans le cas présent, la responsabilité de la société de livraison est engagée, car le dommage subi aurait pu être évité dans des conditions normales.

Al-Kâsânî, juriste hanafite, écrit dans Badâ’i‘ al-Sanâ’i‘ que l’exonération systématique de ces employés ouvrirait la voie à la négligence et à la mauvaise foi, au détriment des biens des gens, surtout en l’absence de témoins.

Selon l’Encyclopédie koweïtienne de jurisprudence, les savants s’accordent à dire que si la perte est due à une négligence ou à une faute manifeste, la responsabilité incombe sans ambiguïté à l’employé ou à la société.

  • En cas de perte sans faute avérée, les avis divergent :
    • Selon Abû Yûsuf, Muhammad (tous deux hanafites) ainsi que les hanbalites, la responsabilité est engagée même sans négligence, en conformité avec les positions de ‘Umar et ‘Alî (qu’Allah les agrée), afin de préserver les biens des gens.
    • Certains mâlikites et shâfi‘ites considèrent que la responsabilité est retenue si le dommage était évitable dans des conditions ordinaires (comme un vol ou un incendie non exceptionnel).
    • D’autres, notamment certains anciens mâlikites et Zufar, estiment qu’en l’absence de faute prouvée, la responsabilité ne s’applique pas. Cet avis est également rapporté de certains juristes shâfi‘ites.

Modalités d’indemnisation :

Deux situations doivent être distinguées :

  • Si le bien est fongible (mithlî), c’est-à-dire facilement remplaçable par un équivalent sur le marché, la société doit en fournir un substitut identique.
  • Si le bien est non fongible (qîmî), donc unique ou difficile à remplacer, la société est tenue d’en rembourser la valeur marchande au moment du dommage.

Sharh al-Wiqâya (hanafite) précise que la distinction entre ces deux catégories repose sur la stabilité de la valeur marchande.

Al-Mawsû‘a al-Fiqhiyya al-Kuwaytiyya établit que la compensation peut se faire soit par un équivalent, soit par la valeur du bien sur le lieu et au moment de la perte.

Calcul de la valeur :

L’évaluation doit se baser sur le prix du marché au moment de la perte, indépendamment du prix d’achat ou du bénéfice escompté.

Ibn al-Qayyim insiste sur une évaluation objective, distincte des accords contractuels.

Al-Haddâd (mâlikite) souligne la différence entre le prix convenu (entre vendeur et acheteur) et la valeur réelle, qui relève d’une estimation neutre.

  • Le Code ottoman (Majalla) renforce cette distinction :
    • Article 153 : Le prix payé n’est pas forcément le reflet de la valeur réelle.
    • Article 154 : La valeur désigne le prix effectif sur le marché.

Conclusion :

En conséquence, vous avez pleinement droit à une indemnisation par la société de livraison, conformément aux principes reconnus de la jurisprudence islamique.
Le montant à verser doit correspondre à la valeur marchande des pantalons au moment de leur perte, cette estimation devant être faite par des experts compétents.
Il convient de noter que cette valeur peut différer du prix d’achat ou du prix de vente prévu.

En cas de litige, il est recommandé de recourir à une juridiction islamique compétente pour obtenir une évaluation équitable et prendre en compte d’éventuels droits ou responsabilités supplémentaires.

Et Allah sait mieux.

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